Le secteur public luxembourgeois en mode digital

PwC Luxembourg

Aujourd’hui plus que jamais, la transformation digitale du secteur public prend tout son sens. Dans un environnement toujours plus digitalisé, le secteur public constitue le fer de lance de la transformation digitale de l’économie toute entière. Où se situe le Luxembourg en matière de modernisation et de numérisation de son service public? Tour d’horizon avec Philippe Pierre, associé en charge du secteur public à Luxembourg et responsable mondial Institutions européennes chez PwC et Thierry Kremser, associé en charge de la technologie pour le secteur public chez PwC Luxembourg.

Dans un environnement de plus en plus digitalisé, comment le secteur public appréhende-t-il son développement numérique?
PP: Le secteur public a entamé sa digitalisation depuis quelques années déjà, en contribuant à dynamiser la transformation digitale de l’économie et à simplifier les démarches administratives des citoyens. La digitalisation de la société doit toutefois s’appréhender à travers deux niveaux: au niveau européen et au niveau local. Pour le premier, l’Union européenne a développé une stratégie dédiée pour permettre aux 28 Etats membres de coordonner leurs efforts de digitalisation lorsqu’ils fournissent des services publics aux citoyens et entreprises. Le cœur de cette stratégie réside dans le principe d’interopérabilité, qui vise à définir une approche commune lorsque les administrations mettent en ligne leurs services. Pour les citoyens comme pour les entreprises, ce nouveau cadre d’interopérabilité européen favorisera la communication avec leurs administrations nationales et celles des autres Etats membres de l’Union européenne. Il permettra d’échanger les informations localement, nationalement et dans l’ensemble de l’Union européenne de manière plus fluide. Un exemple concret dans lequel ce nouveau cadre peut s’appliquer? On peut penser notamment au remboursement de frais de soins médicaux reçus dans un autre pays que celui de sa résidence, ou encore à la gestion des questions relatives à la fiscalité et aux droits de douane.
TK: Au niveau national, l’ensemble des Etats membres doivent s’aligner sur les directions données par Bruxelles. Les administrations doivent aussi faciliter les démarches qu’elles rendent aux citoyens et aux entreprises. Pour s’assurer que les pays membres de l’Union européenne assurent une transition efficace vers une économie et une société numérique, la Commission européenne publie chaque année le Digital Economy & Society Index (ou DESI), un rapport dans lequel elle évalue les 28 pays membres en matière de digitalisation du secteur public. Dans son rapport de 2017, la Commission a positionné le Luxembourg à la cinquième place. Un positionnement plus qu’encourageant, surtout en matière de connectivité, de compétences numériques et d’utilisation d’Internet. Le pays progresse aussi significativement en ce qui concerne l’usage des technologies numériques par les administrations publiques.
Justement, quelle est la démarche du Luxembourg en ce qui concerne la digitalisation du secteur public?
PP: La modernisation des services publics vise bien sûr à simplifier l’expérience des citoyens et des entreprises lors de leurs démarches administratives, mais pas seulement. La digitalisation du secteur public est aussi une question de compétitivité: pour qu’un pays reste attractif et compétitif au niveau international, l’efficacité de l’administration doit être au rendez-vous. Le Luxembourg investit depuis plusieurs années déjà dans la modernisation de ses outils informatiques et dans la création de systèmes d’informations innovants pour les utilisateurs. Le but est d’attirer et de développer de nouvelles activités sur son territoire. La démarche du Luxembourg est clairement entrepreneuriale!
TK: Notre pays dispose de nombreux atouts pour assurer une digitalisation de son service public réussie. Les infrastructures de communication de qualité et l’hyperconnectivité des citoyens créent un environnement favorable à la modernisation de l’administration. À ce titre, le pays a lancé en 2016 le programme «Einfach Lëtzebuerg» qui vise à simplifier les démarches administratives des citoyens et des entreprises et à entamer un dialogue plus direct entre l’administration et les citoyens du pays. De plus, un certain nombre d’initiatives ont vu le jour récemment, notamment au travers du CTIE (le Centre des technologies de l’information de l’Etat), et montrent que le pays est sur la bonne voie pour digitaliser le secteur public.
Quelles initiatives vous viennent à l’esprit?
PP: Depuis le 1er juillet 2016, un nouveau règlement européen sur l’identification électronique et les services de confiance pour les transactions électroniques est entré en vigueur – il s’agit du règlement eIDAS (ou Electronic IDentification And trust Service). Il contribue à faciliter les échanges numériques en permettant, entre autres, d’instaurer un cadre légal lors de la signature électronique à distance de documents. La technologie induite par ce règlement permet d’améliorer considérablement l’expérience utilisateur puisqu’elle simplifie largement les procédures lors de signatures de documents à distance. Elle offre la possibilité aux citoyens et entreprises luxembourgeois de réaliser des démarches en ligne dans n’importe quel pays membre de l’Union européenne sans devoir avoir recours à un moyen d’identification électronique du pays en question.
TK: Citons également la récente ouverture de la première ambassade digitale au Luxembourg. L’Estonie a en effet décidé de conserver ses données e-gouvernementales dans un data centre basé au Luxembourg – une première mondiale! Un exemple de plus qui montre que la stratégie du pays en matière de modernisation du service public est payante et va dans la bonne direction.