Parc naturel de l’Our: huit communes, une vision

Regroupant huit communes du nord-est des Ardennes luxembourgeoises, au tripoint entre la Belgique, l’Allemagne et le Luxembourg, le Parc naturel de l’Our œuvre à concilier la protection de la nature, la promotion culturelle et le développement économique de la région. L’organisme, issu de l’ancien syndicat intercommunal de la vallée de l’Our (SIVOUR) et officialisé par le règlement grand-ducal du 9 juin 2005, gère une surface de 306 km2 avec environ 16.000 habitants. Christian Kayser, son directeur, a participé à son développement dès la première heure.  
  
«Le Parc naturel de l’Our fut, en 1999, le deuxième parc naturel à être fondé dans le cadre d’une loi créée six ans plus tôt – la loi luxembourgeoise relative aux parcs naturels. Celle-ci a attribué, en août 1993, la gestion de l’initiative au Département de l’aménagement du territoire. Le label «Parc naturel» est décerné pour une durée de dix ans. A la fin de cette période, un bilan est dressé. Si les communes impliquées en expriment le souhait, le label peut être reconduit pour une durée de dix ans, à condition que le patrimoine naturel et culturel ait été sauvegardé et promu conformément à la loi précitée. Les projets typiques d’un Parc naturel s’articulent notamment autour du tourisme durable, de l’agriculture raisonnable et de l’environnement. Le nôtre en est à sa deuxième phase. Après le bilan positif des dix premières années, la phase actuelle, qui a démarré en 2015, se poursuivra jusqu’en 2025», explique Christian Kayser.
 
Il poursuit: «La gestion d’un Parc naturel s’apparente à celle d’une commune ou d’un ministère. Chacun des syndicats assurant la gestion d’un Parc naturel, en l’occurrence, ceux de la Haute-Sûre, du Mullerthal et de la vallée de l’Our, dispose d’un bureau et d’un comité. Le comité, c’est le conseil d’administration. Chaque commune participante y est représentée par un délégué et compte un nombre équivalent de représentants des ministères concernés. Ces délégués, au nombre de 16 dans notre syndicat, élisent le président, le vice-président, ainsi que le bureau exécutif du syndicat, qui m’emploie. Emile Eicher, bourgmestre de la commune de Clervaux, est notre président depuis la phase initiale».
 
Le principe de collaboration
Les syndicats intercommunaux sont des entités publiques et, en tant que telles, elles participent et contribuent au dessein stratégique national.
«Ces dernières années, les communes se sont vues attribuer, au-delà de leurs missions originaires, un nombre croissant de missions facultatives, qu’il s’agit de mener à bien. Quand nous avons lancé l’initiative, nous comptions 14 communes participantes, de petite taille. Cela a entraîné une culture de la collaboration, contrairement au sud du pays, où les communes sont plus importantes et plus à même d’agir de façon autonome. Par exemple, une petite commune n’aura pas les ressources administratives nécessaires pour participer à un projet européen. Et quand elle décidera d’agir concrètement sur le terrain, elle touchera rapidement à ses limites géographiques. L’idée du Parc naturel est de se rassembler afin d’être plus efficaces. Nous réunissons des représentants des communes et de l’Etat qui s’échangent et s’accordent sur des mesures à prendre».
«En effet, entre une commune située au sud ou au nord du Parc, les priorités peuvent être divergentes. Mais la fréquence de nos réunions et le fait qu’elles se déroulent à toutes sortes de niveaux – technique, environnemental, économique, et cetera – favorise considérablement le processus de démarche commune. Notre philosophie est d’aborder les défis au niveau régional plutôt que strictement local. Au-delà de la plateforme, nous nous entendons comme prestataire de services pour les communes du Parc. Imaginons qu’une de ces communes ait une idée. Elle vient nous consulter, et notre équipe tentera de convertir cette idée en projet et ce projet en réalisation, notamment en impliquant d’autres communes susceptibles d’y être intéressées. Nous sommes source de propositions, et notre démarche consiste à obtenir un consensus régional. Ce mode de fonctionnement est commun aux trois Parcs naturels luxembourgeois».
 
L’union fait la force
Concernant l’étude stratégique de 2015, inspirée des théories économiques de Jeremy Rifkin, Christian Kayser explique: «Parmi les activités s’inscrivant dans cette démarche, il y a par exemple le Pacte Climat, dans lequel nous sommes engagés. Il se trouve que les communes membres du Parc naturel de la Haute Sûre et du nôtre sont les seules à aborder ce Pacte à un niveau régional. Nous avons pu convaincre le gouvernement du bien fondé de notre démarche et, notamment, obtenu une réglementation financière favorable en vue d’encourager les habitants de l’ensemble des communes du Parc à opter pour des solutions domestiques énergétiquement efficientes. Par exemple, en ce qui concerne les appareils électroménagers, les systèmes de chauffage, la rénovation immobilière… le taux est identique pour chaque habitant d’une commune du Parc, qu’il habite à Tandel ou à Wincrange».
«Dans un autre registre, celui de la communication, nous avons décidé de créer un seul site web, et non huit. Nous avons également fait effectuer un seul sondage par TNS-ILRES pour toutes les communes du Parc. De manière générale, nous délibérons, réglementons, organisons, informons et sensibilisons…ensemble. Dans le contexte du Pacte Climat, cela a porté ses fruits. En effet, quatre communes du Parc se sont vu décerner le plus haut niveau de certification, les autres ont obtenu un score qui dépasse les 50%. Quand on sait que l’approche régionale des activités du Parc contribue à raison de 16 à 18% aux résultats obtenus à l’issue de l’audit du Pacte Climat, on se rend compte de notre engagement en matière de développement durable».
 
Un travail de longue haleine
«Cela fait 18 ans que je travaille pour le Syndicat pour l’Aménagement et la Gestion du Parc Naturel de l’Our. J’ai pu constater que la réussite de ce genre d’initiative est tributaire de la confiance que lui accordent les acteurs impliqués. N’oublions pas que chaque commune est déjà, au départ, membre de nombreux autres syndicats. Or, nous ne pouvons obtenir des résultats positifs qu’en fédérant un effort collectif. Un organisme comme le nôtre n’intervient pas dans le principe, fondamental, de l’autonomie des communes. Contrairement à celui de nos confrères allemands et français, notre avis n’est pas requis, mais facultatif. Il faut également tenir compte du fait que les intérêts politiques et/ou économiques peuvent diverger d’une commune à une autre. Il y a donc lieu d’établir un équilibre et de trouver des solutions qui conviennent à tous. Je ne puis que me féliciter de l’engagement qu’ont pris les communes de ce Parc, conjointement avec le gouvernement, le ministère de l’Environnement et le département de l’aménagement du territoire ces dernières années. Notre taux de participation à des projets subsidiés est d’ailleurs supérieur à celui de certaines «grandes» communes du Grand-Duché».
«Nous estimons que le paysage est le capital d’une région et d’un Parc naturel. Or, la nature et l’environnement sont sujets à des transformations permanentes. Nous nous devons de thématiser les développements négatifs et de promouvoir les changements positifs. Cela passe bien entendu par la communication. Nous avons notamment organisé une exposition du photographe Raymond Clement autour de notre patrimoine paysager. Par la suite, les deux autres Parcs naturels ont rejoint le projet. Chaque Parc s’est doté d’un thème spécifique: Nous, c’était la nature et les paysages. La collaboration entre Parcs naturels est d’ailleurs très étroite. Nous avons par exemple mis au point un système d’information géographique commun, pour les communes que nous servons, ce qui nous a entre-autre permis de réaliser une économie d’échelle. Nous nous sommes également chargés, ensemble, d’assurer les formations y étant relatives».
«Notre activité est particulièrement variée. Pour revenir au domaine de la culture, elle peut consister à initier ou accompagner l’organisation d’expositions et de festivals ainsi que de promouvoir des artistes et galeries de la région. Si le rôle des offices régionaux de tourisme est de commercialiser la culture dans un contexte interrégional lui-même inclus dans une stratégie nationale, le nôtre est de trouver de nouvelles impulsions pour le tourisme et la culture».
 
Par Serge Garcia Lang
Photo © Raymond Clement

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