L’âge de raison
À l’occasion de son dixième anniversaire, l’Institut National pour le Développement durable et la Responsabilité sociale des entreprises fait le bilan du chemin parcouru et affiche celui à venir. Le secrétaire général de l’INDR Norman Fisch n’oublie pas que seuls 8% des dirigeants avaient entendu parler de RSE à ses débuts, contre 150 entreprises labellisées et quelque 1.000 sensibilisées à ce jour. Morgane Haessler, chargée de projet pour l’INDR et présidente de l’association ProRSE, nous présente cette plateforme de partage à l’égard des professionnels de la RSE. Interview d’une promesse de maturité à venir.
Quelles ont été vos premières démarches à vos débuts en 2007?
NF: Nous avons commencé par penser la responsabilité sociale des entreprises dans le champ luxembourgeois. Nous avancions alors à tâtons et avons dû identifier les problèmes et comprendre les activités des entreprises du pays. Nous avons donc établi une définition commune de ce qu’est la RSE pour le Luxembourg et avons ensuite développé des solutions et des outils adaptés.
Tout le challenge de l’INDR était de faire comprendre aux dirigeants d’entreprises que la RSE crée de la valeur pour l’entreprise et pour la société dans laquelle elle s’inscrit. En termes de viabilité, une entreprise ne peut plus considérer le retour sur investissement comme seule pierre angulaire de son édifice économique. Le capital intangible, les processus et la valeur créée pour le client doivent aussi faire partie intégrante d’une stratégie d’entreprise.
Nos dix ans d’activités nous permettent aujourd’hui de bien connaître les entreprises du pays, leurs préoccupations et leurs potentialités. Le taux de relabellisation très élevé montre que les entreprises labellisées s’inscrivent naturellement dans une démarche d’amélioration continue sur le long terme.
Qu’est-ce que le Guide ESR? Le Guide ESR est un outil au service du développement durable des entreprises désireuses de formaliser et de confirmer leur niveau de responsabilité. Comme les attentes de la société changent, le Guide évolue, il s’adapte aux tendances et aux nouvelles pratiques et réglementations. C’est pourquoi une version en anglais sera bientôt disponible et intégrera quelques nouveautés comme la Réglementation Générale sur la Protection des Données (RGPD) par exemple.
Le Guide permet à toute entreprise d’avoir une vue d’ensemble des principales attentes de la société et de comprendre les bienfaits de la RSE. Si la RSE s’applique à toutes les entreprises, chacune a des manières différentes de la mettre en œuvre.
Présentez-nous les quatre grands services du programme ESR de l’INDR…
NF: La première de nos missions est la sensibilisation des entreprises afin qu’elles s’inscrivent dans la conscience collective. La seconde étape est l’autoévaluation sur www.esr.lu; il s’agit de savoir si le comportement actuel de l’entreprise est responsable et quels sont les points d’amélioration.
Le résultat de son évaluation donne ensuite les outils pour intensifier son engagement pour lequel la direction de l’entreprise joue un rôle essentiel. C’est le temps des réflexions sur la performance, sur les problématiques relevées et sur la capacité qu’a l’entreprise de se challenger sur de nouvelles actions RSE à planifier. L’INDR accompagne les entreprises dans ce processus en référençant, dans le Guide ESR, les initiatives nationales existantes qui aident les entreprises à répondre aux problématiques qui leur sont posées. Nous en avons relevé à ce jour plus d’une trentaine, et ce travail d’identification n’est pas terminé. Je prends pour exemple une entreprise qui souhaite mieux gérer son stock de déchets et améliorer la sécurité de ses employés, nous l’orientons alors vers la « SuperDrecksKëscht » et le label « Sécher & Gesond mat System » de l’AAA.
Enfin, la labellisation ESR confirme le niveau élevé de responsabilité d’une entreprise par le biais d’une vérification indépendante réalisée par un expert agréé de l’INDR. Le label ESR devient ainsi également un outil de communication qui permet de valoriser la démarche RSE de l’entreprise.
Est-il envisageable que le label devienne une norme applicable à toutes les entreprises luxembourgeoises?
NF: Nous avons pour ambition, à terme, que toutes les entreprises du pays soient responsables. Le label n’est que la cerise sur le gâteau, ce qui importe véritablement, c’est l’aboutissement des efforts qu’elles ont entrepris.
Nous sommes pour l’heure à un stade embryonnaire d’une économie vertueuse où les acteurs généreront des impacts positifs sur la société et l’environnement. La prochaine étape verra les entreprises responsables travailler de plus en plus entre elles.
Je suis persuadé que dans dix ans, toutes les entreprises du pays devront être dotées d’une véritable politique RSE, sans quoi elles ne seront plus assez compétitives sur le marché. Les entreprises responsables seront au cœur de l’économie de demain.
L’association ProRSE entend-elle favoriser ce réseau vertueux?
MH: Cette plateforme de partage et d’échange, lancée le 24 novembre 2017, est la première association des professionnels de la RSE au Luxembourg. Elle rassemble les experts agréés par l’INDR, des auditeurs et conseillers en RSE, des consultants mais aussi les responsables RSE des entreprises et tout autre salarié impliqué dans la mise en œuvre de la stratégie RSE de son entreprise, comme souvent, les DRH, les responsables qualité ou encore les responsables de la communication ou du marketing.
Nous avons constaté que beaucoup d’entreprises rencontrent les mêmes problèmes et ProRSE sera l’occasion pour ces dernières de les partager mais aussi d’échanger leurs solutions et bonnes pratiques identifiées.
ProRSE entend défendre les intérêts des professionnels des métiers liés à la RSE, promouvoir et développer les professions liées, assurer la représentation de ses membres auprès de groupements d’intérêts nationaux ou internationaux et de l’Etat, définir un cadre déontologique et garantir le respect des pratiques professionnelles, faciliter les contacts, échanges d’expériences et coopérations et améliorer le niveau d’information et de formation professionnelle des membres et promouvoir la qualité des prestations liées à la RSE.
Sous quelle forme se présente ProRSE?
MH: Mensuellement, les formats de nos rencontres différeront à travers des ateliers de travail, des conférences ou encore des forums. La première rencontre aura lieu à la Chambre de Commerce le 1er février 2018. Cet événement est organisé en collaboration et en exclusivité avec un de nos membres, Infogreen, qui présentera à cette occasion un nouveau média totalement inédit et innovant.
Ce sont les coordinateurs de la RSE, responsables d’entreprises et experts qui ont émis le souhait de disposer d’un lieu de partage tel que celui-ci. Nous avons réuni en quinze jours seulement une vingtaine de membres et en attendons une centaine d’ici la fin de 2018.
Tout professionnel actif de la RSE à Luxembourg peut devenir membre de l’association en adressant sa candidature et son CV via prorse.lu. Tous les professionnels seront invités à nos dix ans que nous fêterons en mars 2018 à la Chambre de Commerce.