L'accessibilité, partie intégrante du développement durable

Le gouvernement luxembourgeois a accordé la priorité aussi bien au développement durable qu’à l’accessibilité dans son programme gouvernemental. Pour nous, l’accessibilité est partie intégrante du développement durable de notre société. Le «non accessible» ne peut pas être considéré comme durable. Rencontre avec Magnus Koerfer, architecte et responsable CCNAB.
 
Le gouvernement ne s’engage-t-il pas assez pour améliorer l’accessibilité?
L’engagement du gouvernement pour l’accessibilité est bien réel. Il est explicitement invoqué dans le programme gouvernemental de 2013 que l’amélioration des conditions d’accessibilité constitue un élément considérable de la politique du gouvernement actuel. En effet elle ne constitue qu’un volet du chapitre traitant de la politique pour les personnes handicapées. Dans ce chapitre, le gouvernement prône les principes du « Design for All »* en précisant que: «L’accessibilité est à développer en particulier dans les lieux ouverts au public, dans le domaine des transports publics, ainsi qu’en matière de communication, dans les différents formats électronique, imprimé et télévisé».
 
En 2017 et en 2018 nous avons des élections respectivement communales et législatives. Est-ce que l’accessibilité est encore un sujet qui intéresse les électeurs?
Bien sûr, c’est même un sujet politique à première vue facile. Travailler dans l’intérêt d’une population défavorisée est toujours bien vu par le grand public.
Nous constatons néanmoins que tenir les promesses faites s’avère plus compliqué sur le terrain et que, souvent pour des raisons techniques ou parfois purement esthétiques, des décisions sont prises sans réfléchir aux conséquences de celles-ci pour les personnes en situation de handicap. Il est important de souligner qu’il existe beaucoup de déficiences différentes et que la notion de handicap ne se limite pas seulement aux personnes à mobilité réduite.
En effet les problèmes rencontrés tout au long d’une opération de construction génèrent souvent des compromis. Ceux-ci sont trop souvent acceptés sans le recul nécessaire et créent des faits accomplis, avec lesquels il faut vivre par après.
 
Le Statec vient de publier que depuis un peu plus de 30 ans l’espérance de vie des hommes a augmenté de 10,2 ans et celle des femmes de 8,1 ans…
D’où l’intérêt de penser à l’accessibilité! Une évolution qui met le Luxembourg dans le peloton de tête de l’union européenne en matière d’espérance de vie. Demain nous aurons  inévitablement une population vieillissante voulant cependant participer à la vie active. Les retraités de demain sont parmi ceux qui vont utiliser les moyens de transports et représentent bien évidemment des clients potentiels pour les commerces.
 
Est-ce plus difficile de changer les infrastructures ou les mentalités, et quels sont les pièges à éviter?
Nous vivons une période riche en projets d’infrastructures, bien perceptible par tous les chantiers en cours. La façon d’entamer les projets a changé, les mentalités des différents intervenants sur le terrain n’a pas nécessairement suivi. Trop souvent nous sommes confrontés à des projets dans lesquels les différents intervenants traitent leur volet de façon isolée sans disposer d’une vue d’ensemble du projet. L’accessibilité est une chaîne et il suffit d’un seul maillon faible pour mettre en péril l’ensemble.
Il est illusoire de croire qu’on peut régler l’accessibilité après coup. En effet, ces solutions sont souvent inesthétiques et très coûteuses et ainsi mal acceptées par le grand public.
La notion de sécurité est un facteur bien accepté par notre société. L’enjeu est d’intégrer la notion de l’accessibilité dans nos mentalités.
Les pôles multimodaux sont l’exemple type où les concepteurs ont veillé à intégrer dès le départ les besoins de tous. En effet, les flux des différents usagers et l’optimisation de l’accessibilité ont bien été pris en compte.
 
D’où votre engagement pour le « Design for All ».
Toute construction est conçue et construite pour persister dans le temps. Le concept du « Design for All » permet de combiner les besoins actuels et futurs des utilisateurs avec les idées innovatrices, l’expertise et le savoir-faire des spécialistes. Il ne s’agit pas de solutions miracles mais le « Design for All » peut servir en tant qu’outil de « déstigmatisation » des solutions adaptées ou adaptables, entre autres, aux personnes handicapées et âgées.
Les stratégies du « Design for All » permettent de créer, dès le stade de la conception, des produits et solutions utilisables par le plus grand nombre d’usagers. Permettant à ses habitants, le cas échéant moyennant des adaptations mineures, de se déplacer et d’évoluer sans barrières artificielles et sans contraintes quel que soit leur situation ou leur âge.

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