«Des alternatives à l'agriculture traditionnelle sont possibles»

Le glyphosate est au centre de sujets tumultueux. Chacun a son avis concernant le renouvellement de son certificat. Pourtant ce n’est pas le seul pesticide ou problème connu dans l’agriculture traditionnelle. Des alternatives existent pour contrer ce type de produits et l’agriculture biologique en est une. Avec elle, elle apporte des solutions et une autre vision de la consommation. Interview avec Daniela Noesen, directrice de Bio-Lëtzebuerg asbl.
Quelles actions menez-vous grâce à votre association?
Bio-Lëtzebuerg asbl est né en 2012, suite à la fusion de deux associations, bio-LABEL et Demeter. C’était un moyen de réunir nos forces et de faciliter notre travail. L’organisation possède les droits pour les marques collectives Demeter et Bio LËTZEBUERG, ce dernier label existe depuis 2015 et a remplacé bio-LABEL; il permet aux agriculteurs de mettre en avant leurs produits biologiques.
Dans notre travail quotidien, nous poursuivons trois buts différents. Nous voulons, dans un premier temps, mettre en relief le travail des agriculteurs au Luxembourg et leurs accomplissements en termes de protection de l’eau, de biodiversité ou encore de bien-être animal. Dans un second temps, grâce à nos marques (Demeter et Bio LËTZEBUERG), nous certifions des produits issus de l’agriculture bio-dynamique. Enfin, nous avons le travail politique en termes d’apport d’idées nouvelles au cadre législatif que fournit la politique européenne. Nous avons par exemple récemment contribué à la mise en place de la loi agraire.
 
Pourquoi pensez-vous que le bio est la voie à suivre pour contrer les pesticides?
Il y a toute une sorte de philosophie derrière l’agriculture biologique. La chose la plus importante que nous avons, ce sont nos sols. La préoccupation majeure de l’agriculture bio-dynamique est d’améliorer la composition et la fertilité de nos terres, et tout cela repose sur un cycle. Les animaux dépendent de la quantité de nourriture produite sur les surfaces agricoles et cette production de nourriture dépend du fumier apporté par les animaux sur les champs.
Nos précieuses ressources telles que la terre, l’eau ou la biodiversité doivent être durablement protégées, afin de nous assurer une alimentation saine. La rotation des plantations, la culture de plantes résistantes et la lutte mécanique contre les mauvaises herbes, comme l’herse et la sarcleuse, sont autant de moyens d’obtenir des cultures saines. Ainsi l’agriculture biologique offre des alternatives aux méthodes conventionnelles.
L’idée du cycle peut également être utilisée dans les élevages: la vache, en tant que ruminant, est prédestinée à digérer l’herbe. Il faut savoir que le trèfle est une bonne base de fourrage et une alimentation équilibrée pour les bovins. Dans la rotation des cultures, il entraine une fixation de l’azote de l’air absorbé par la plante, qui ensuite peut servir de source de protéines dans l’alimentation des bovidés. Le reste de l’azote présent dans les racines peut également être employé comme engrais pour les cultures suivantes. Le fumier des vaches sera également épandu sur les champs: cet engrais organique provoque la formation d’humus dans le sol et permet ainsi un stockage de CO2 qui est bénéfique pour la protection du climat. Les effets positifs sont donc présents et représentent dans leur ensemble un véritable développement pour l’agriculture.
 
Comment l’agriculture biologique est-elle contrôlée?
Tous les produits issus de l’agriculture biologique en Europe ont l’obligation d’afficher le logo établi par la législation européenne, ce qui permet d’en connaître l’origine. Tous les ans, les agriculteurs sont soumis à des contrôles selon leur type de production. Pour la vente, tout fermier doit posséder un certificat justifiant son implication dans l’agriculture biologique, ce qu’il peut obtenir par différents organismes dont notre association. Ces labels enregistrent également la manière dont le produit a été développé et son origine. Ce système permet d’avoir la confiance du consommateur, puisqu’il est transparent pour celui-ci.
 
Qu’est-ce que le gouvernement pourrait faire de plus pour contrer les pesticides?
Selon moi, ça n’a aucun sens d’interdire complètement les pesticides, cela peut juste conduire à une résistance. Je pense que principe de pollueur-payeur est un moyen à explorer. Des taxes sur les pesticides ont par exemple été apposées au Danemark ou au Pays-Bas. C’est une façon de contrer les dommages collatéraux provenant des pesticides et de, par exemple, rendre disponible des moyens financiers afin de lancer des recherches pour la protection de l’eau.
Le gouvernement à également la possibilité de servir de guide à la société en donnant davantage de subventions aux bio-agriculteurs. D’un autre côté, nous avons également un besoin d’alternatives et d’un nouveau système de penser l’agriculture. Cependant, ce n’est pas possible sans la participation du consommateur. Celui-ci doit être conscient de la façon dont il achète et se nourrit. C’est seulement ensemble que nous pouvons résoudre ces problèmes.
 
Selon vous, quelles sont les solutions à l’agriculture traditionnelle?
Selon moi, la solution est évidemment l’agriculture biologique. Elle a de nombreux impacts positifs. Certaines personnes disent que nous ne pouvons pas nourrir le monde entier avec l’agriculture biologique, tandis que d’énormes quantités de nourriture sont jetées tous les jours. Je pense qu’il est temps de trouver un meilleur équilibre, afin d’être durable dans notre façon de consommer en faveur de notre environnement et de nos ressources. Nous devons porter davantage de valeur à nos denrées et en être conscient.
 
Finalement, qu’est-il important de faire aujourd’hui pour supporter l’agriculture?
Nous devons amener la société à avoir un contact avec l’agriculture, notamment dans l’éducation de nos enfants. Nous devons être plus conscients de ce que l’économie rurale représente et signifie. Selon nous, c’est une base fondamentale et la politique pourrait, à cette fin, servir de guide à la population. Ici au Luxembourg, nous avons de magnifiques paysages prédestinés à l’agriculture biologique, de même qu’un marché pour ce type de produits. Une bonne solution donc pour notre pays.    JuP

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