La formation continue les pieds sur terre
La formation tout au long de la vie constitue un véritable soutien face à un marché du travail en constante évolution. Gabriel Van Bunnen, chef de projet, nous explique dans cette interview quelles sont les stratégies de l’IUIL, l’Institut Universitaire International Luxembourg, pour offrir des formations de qualité. Il détaille également les outils en place ainsi que les enjeux futurs de ce domaine touché par la digitalisation.
L’IUIL existe depuis 1974. Depuis tant d’années, la formation continue a évolué. Quels sont les grands changements auxquels vous avez dû faire face?
Rattaché au ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche, l’IUIL avait à l’origine comme principale mission la formation universitaire, plus particulièrement dans une logique de cours d’été à vocation internationale. En 2003 a eu lieu un élargissement important de ses missions puisque l’institut a embrassé des activités liées à la formation continue.
L’un des bouleversements majeurs est la multiplication du nombre d’acteurs. Au Luxembourg, on trouve aujourd’hui une centaine d’opérateurs en formation continue, ce qui a engendré une belle diversification de l’offre. Qui dit plus d’opérateurs, dit aussi plus d’exigences: les travailleurs ont la possibilité de choisir au sein d’un très large panorama par conséquent, leurs attentes sont assez hautes.
En parallèle, les entreprises qui envoient leurs salariés en formation demandent de plus en plus un retour sur investissement. En effet, une action de formation consomme du temps, de l’argent et de l’énergie. Pendant ce temps, le travailleur n’est généralement pas actif dans la société. Il faut donc que la formation bénéficie à la fois à l’apprenant mais aussi à l’organisme qui l’envoie.
Quelle est la situation de l’institution aujourd’hui?
Notre équipe est composée de 18 personnes aux profils variés et internationaux ce qui est intéressant car nous travaillons en allemand, en français, en luxembourgeois et parfois en anglais. Nous sommes installés depuis peu sur le site de la Maison du Savoir à Esch-Belval: un déménagement stimulant car nous sommes plus proches d’autres acteurs universitaires.
Notre cœur d’activité est bien entendu la formation continue, mais au sens large du développement des compétences des collaborateurs. Nous nous adressons à tout type d’acteurs: organisations publiques, parapubliques, sociétés privées… Ce qui nous confère une grande richesse de partenariat. Ces collaborations nous permettent d’être vraiment à l’écoute de l’univers socio-économique grand-ducal. Cela nous aide à accomplir notre principal objectif: soutenir l’économie luxembourgeoise par l’enrichissement des compétences.
Quelle est votre stratégie pour répondre à cet objectif?
D’abord, nous organisons régulièrement des études thématiques dont le but est d’anticiper les compétences qui seront essentielles demain, et ce dans chaque domaine d’activités. Nos groupes de travail réunissent des experts et mettent en place des formations adaptées aux besoins spécifiques de chaque secteur.
Nous mettons ensuite l’accent sur la qualité de nos formations. Notre projet de recherches Qualiform a d’ailleurs mis en lumière les éléments qui conditionnent cette qualité, notamment l’environnement professionnel, la motivation de l’apprenant et l’approche pédagogique. Cette approche pédagogique a d’ailleurs fait l’objet d’une attention particulière de notre part. Nos formations se basent sur le fameux modèle «70/20/10». Selon ce modèle, un individu apprend de trois façons différentes: 70% par l’expérience de terrain, 20% par contact avec les collègues et seulement 10% via la formation continue. Face à ce constat, nous développons des formations qui tirent profit de ces trois sources. Pragmatiques, elles sont proches de la réalité de terrain. Par des mises en situation, jeux de rôle ou encore projets à développer au sein même de leur organisme, les apprenants sont en confrontation avec leur milieu professionnel. Par exemple, dans une formation managériale en secteur hospitalier, un participant a optimisé le système de facturation de la clinique qui l’emploie. Cette approche situationnelle permet un véritable transfert de l’apprentissage dans la pratique. Les connaissances acquises vont donc non seulement se déployer sur les 10% provenant de formation, mais aussi sur les 90% restant car le contenu est appliqué directement au terrain professionnel ainsi que par dialogues avec les collaborateurs.
Enfin, un autre élément qui nous permet de nous démarquer est notre capacité à concevoir des formations sur-mesure. Nous analysons en profondeur les besoins d’une organisation, puis nous développons une maquette pédagogique adaptée et inédite. Une fois les intervenants et des thèmes choisis, nous organisons la formation dans l’entreprise concernée ou dans nos locaux, de façon très flexible: un confort incomparable pour les sociétés!
Quels sont vos différents outils de formation?
Notre offre de formations est variée. Formations en soins pharmaceutiques, en droit appliqué, en management en milieu hospitalier, en radioprotection ou pour responsables de formation sont de nos prérogatives. Nous sommes actifs également sur l’aspect ressources humaines et développement des compétences.
L’une des nouveautés est un outil d’analyse des pratiques de formation. L’Autodiagnostic Qualiform s’adresse à toutes les entreprises qui souhaitent questionner la qualité de leurs formations et veulent identifier des axes d’amélioration. Via un questionnaire en ligne sur qualiform.iuil.lu, le responsable des ressources humaines, les employés, les supérieurs hiérarchiques et les formateurs sont invités à s’exprimer. Résultat: nous soulignons les éléments positifs et proposons des actions pour pallier les manquements.
Dans une autre optique, la récente plateforme en ligne Human Capital Toolbox – humancapital.iuil.lu – est une boite à outils destinée aux professionnels des ressources humaines. Ce portail accessible gratuitement propose des informations dont de nombreuses fiches descriptives et feuillets explicatifs, des outils et des formations. Une autre nouveauté en matière de développement des compétences est l’outil Job Manager. Grâce à des fiches de suivi portant sur les compétences à mettre en œuvre dans différents types de fonction, il permet de gérer les compétences des collaborateurs et leur parcours de formation. Cet outil est destiné aux managers RH mais aussi aux personnes en charge de la qualité et de la sécurité car il est avant tout un outil tourné vers les compétences de terrain importantes pour des métiers à gestes par exemple: qualité, environnement, sécurité…
Nous proposons en parallèle deux plateformes gratuites de soutien aux créateurs d’entreprises. Premièrement, business-learning.lu est un portail interactif qui leur propose des solutions et des cours interactifs, via des exposés, vidéos et tests par exemple. Deuxièmement, businessplan.lu offre une assistance à la création du plan d’affaires, de la description de l’idée au financement du projet.
Et dans le futur?
Nous développons de plus en plus une approche multimodale dans nos formations, c’est-à-dire que nous offrons des activités en présentielle mais aussi à distance. Vidéos, tests, lectures ou exercices sont à réaliser au préalable et nous capitalisons ensuite dessus lors de la rencontre: un gain de temps considérable pour tous. Nous tirons ainsi un maximum des nouvelles technologies et notre volonté pour le futur est d’intégrer encore davantage la digitalisation à travers des propositions multimodales. Nous devons sensibiliser aussi bien nos partenaires que nos participants et formateurs aux opportunités de ces outils technologiques qui permettent à l’apprenant de profiter au mieux de sa présence en formation.