Un cadre réglementaire pour les technologies financières

Sur le plateau du Kirchberg où sont implantées tant de multinationales, la rue Erasme est sans nul doute un lieu de synergies. La Chambre de Commerce, la House of Training, l’Association des Banques et Banquiers, Luxembourg (ABBL), la future Luxembourg House of Financial Technology sont à deux pas de la Cour des Comptes et de l’Uni.lu. Rencontre avec Marc Hemmerling et Andrey Martovoy, respectivement Member of the Management Board et FinTech Adviser de l’ABBL.
 
Comment s’est passée votre Assemblée Générale?
MH: Très bien et cette AG a aussi été l’occasion d’élections. Yves Maas et Carlo Thill, respectivement président et vice-président de l’ABBL, ont été reconduits à leurs postes (mandats de deux ans) et quelques changements au niveau du conseil d’administration ont été effectués.
Nous y avons brossé toute une série de points comme l’évolution de la place financière qui a été impactée par les marges diminuantes par exemple mais nous avons aussi pris soin de revoir notre code de déontologie, indispensable dans le contexte actuel.
 
Quel est le rôle historique de l’ABBL dans le “Digital Lëtzebuerg“?
MH: Les banques cultivent une culture des nouvelles technologies qui remonte au minimum aux années 50. De la mécanographie aux ordinateurs en passant par l’électronique, les banques ont été les premières organisations à avoir des réseaux d’agences avec des terminaux. Les guichetiers y faisaient des opérations que les distributeurs de billets des années 80 ont reprises et par la suite sont apparus les terminaux de paiements. Swift est un exemple de système de communication mondial de transactions financières qui est né dans les années 70 et pour lequel les banques luxembourgeoises étaient membres fondateurs.
Ainsi, bien avant la démocratisation d’internet, les banques ont été les premiers acteurs des technologies financières. Cependant nous assistons ces dernières années à une évolution technologique extrêmement importante où des solutions innovantes sont proposées, ce qui créé une vague de sociétés FinTech.
L’ABBL a dès 2014, pris conscience du phénomène et s’est donc engagée dans des groupes de travail au niveau européen où nous faisons partie de l’“European Payments Council“ et de l’“European Banking Federation“. Et dans cette montée de sociétés qui offrent de nouveaux services, il en va de l’intérêt de nos membres de structurer leurs activités.
L’ABBL regroupe 149 membres et si 113 sont des banques, nous comptons aussi des institutions de paiements, des cabinets d’avocats, des consultants ou des PSF de support. Nous avons environ 80 groupes d’experts qui travaillent sur des sujets variés et une quarantaine de nos membres font partie de nos réflexions FinTech.
Les banques comprennent bien les enjeux et nous souhaitons mettre en place un cadre règlementaire. Car de nombreux acteurs FinTech qui offrent des services similaires à ceux des banques ne sont pas pour autant astreints aux mêmes règles. L’idée n’est pas de rajouter plus de réglementation pour pénaliser mais de créer le strict nécessaire peu importe qu’il s’agisse d’une banque ou d’une Fintech.
 
Les sociétés qui commercialisent des technologies financières ne sont-elles pas dès lors, des concurrentes directes des banques?
MH: Les banques sont peut-être moins agiles dans le sens où elles utilisent des systèmes fiables. Les FinTech profitent de cette absence d’agilité et c’est pour cela que nous œuvrons à mettre en place un cadre réglementaire européen. La Commission européenne est d’ailleurs consciente de ce phénomène et des problématiques en termes de responsabilités et de sécurités.
 
Quel est votre plan d’actions?
AM: En janvier 2016, l’ABBL a établi le «Digital Banking et FinTech Innovation Cluster» présidé par Jean Hilger, CIO de la BCEE. Le plan d’actions a été élaboré avec la participation de 44 des membres du Cluster que sont les banques, institutions de paiement, cabinets de conseils et les cabinets d’avocats. Nous avons pu discuter de ce plan avec tous nos membres et nous nous sommes focalisés sur trois axes majeurs.
Le premier est de diffuser la connaissance des banques digitales et des FinTech à tous nos membres. L’idée est de leur exposer les technologies présentes sur le marché est les potentiels qu’elles représentent. Nous allons également établir le groupe de travail en collaboration avec la House of Training pour développer des cours adaptés pour trois niveaux d’employés: opérationnel, “middle management“ et “executive“. Quatre grands sujets que sont la transformation digitale, l’application de la “Blockchain“ dans le secteur bancaire, l’analyse de données et la cyber sécurité seront abordés.
Ensuite, il s’agira d’entrainer nos membres à ces sujets spécifiques. Cette semaine encore nous avons eu des cessions dédiées au Bitcoin et “Blockchain“ et nos membres sont tout particulièrement satisfaits des intervenants qui sont tous des entrepreneurs aguerris qui connaissent un succès reconnu sur le marché.
Nous faciliterons aussi les interactions entre les entreprises FinTech établies à Luxembourg et nos membres afin qu’ils puissent au mieux évaluer dans quelles mesures ils pourront coopérer à l’avenir. Par exemple, pour le moment, notre Cluster est en train d’organiser des “matchmaking réunions“ sur différents sujets et le premier événement réunira nos membres et les entreprises FinTech qui proposent les solutions dans KYC/AML et “client onboarding“.
Nous sommes en phase de finalisation des sujets qui feront partie des discussions que nous aurons avec la CSSF (Commission de Surveillance du Secteur Financier) et la CNPD (Commission Nationale pour la Protection des Données). L’objectif étant de faciliter la coopération entre nos membres et les établissements de recherche, par exemple le SnT et le LIST, dans le domaine FinTech.  JuB

Lire sur le même sujet: