Un appel vert aux développeurs, communes et à l’Etat

Imaginez que vous vivez et travailliez tous les jours dans des bâtiments autonomes. Des bâtiments qui produiraient leur propre chaleur et électricité que des batteries conserveraient, que leurs restaurants seraient alimentés de légumes qui pousseraient dans leurs propres serres sur des toits qui récupèreraient le CO2 et des particules fines à travers des plantes adaptées. «Utopie? Réalité à moyen terme ici, au Luxembourg», nous dit Shahriar Agaajani, docteur en sciences de l’ingénierie. Rencontre avec le gérant de la société de développement immobilier ASARS Constructions, qui tend vers cette philosophie et plaide pour aller au-delà des initiatives énergétiques et écologiques actuelles.
Pouvez-vous nous présenter votre entreprise?
A la base une entreprise de construction, elle s’est rapidement spécialisée dans le domaine du développement immobilier au Grand-Duché de Luxembourg. Elle a été créée par mon père en 1998 et est aujourd’hui dirigée par un groupe d’ingénieurs hautement qualifiés dans le domaine de la construction et de l’innovation. Preuve en est l’attribution de deux prix décernés par l’Ordre des Architectes et Ingénieurs-Conseils en 2004 et 2012 et les nombreux concours internationaux gagnés au cours des dernières années. Depuis 2010 nous sommes également actifs dans le domaine de la recherche et allons à court terme mettre sur le marché un nouveau système de maçonnerie qui risque de faire évoluer la construction d’immeubles en termes d’efficacité physique et conceptuelle. Les recherches, exécutées en collaboration avec Chaux de Contern d’une part et l’Université du Luxembourg d’autre part, viennent également d’être fraîchement distinguées et récompensées d’un prix international remis en Angleterre pour les meilleurs recherches 2015 sur le développement des connaissances sur les systèmes de maçonneries.
Quelles sont vos activités?
ASARS, accréditée artisan certifiée “Maison Passive“ et “Energie fir d’Zukunft +“, produit des biens immobiliers pour des futurs propriétaires et investisseurs ayant des exigences conceptuelles élevées et nécessitant des conseils et approches individualisés tout en étant accompagnés durant tout le processus de l’acquisition. De manière générale, nos conceptions de logements et surfaces commerciales respectent non seulement les exigences énergétiques et techniques futures, mais nous recherchons la perfection dans les détails et dans l’exécution, choses pas toujours évidentes. Pour y arriver, nous nous encadrons en permanence d’une dizaine d’entrepreneurs et de divers bureaux d’études afin de faire aboutir nos concepts architecturaux et énergétiques. Nous travaillons avec les entreprises les mieux qualifiées afin de pouvoir assumer le résultat final et la responsabilité de nos réalisations à long terme. Dorénavant nous nous efforçons à intégrer d’avantage les concepts écologiques dans nos réalisations.
Quelle est votre vision du marché?
Le marché immobilier au Luxembourg est exceptionnel et son dynamisme dans l’adaptation des règlements européens est unique en Europe. Force est de constater que le Luxembourg est l’un des pays les plus évolués en matière de certification et de constructions basse énergie/passif. Les législations européennes intégreront à l’horizon 2020, le concept du bâtiment dont la consommation d’énergie sera quasi nulle, grâce à des capteurs photovoltaïques et des batteries qui stockeront l’électricité durant la journée et qui réinjecteront même le surplus dans le réseau. Législations que le Luxembourg cherche également à faire intégrer. Cependant, la promotion et le développement immobilier au Grand-Duché de Luxembourg devient un exercice de plus en plus difficile. L’acquisition de terrains à des prix exorbitants, basés eux, sur des spéculations du marché immobilier font considérablement grimper les prix des logements et les marges de manœuvre deviennent de plus en plus étroites et risquées. D’autre part, l’intégration des concepts énergétiques et d’autosuffisance deviennent de plus en plus compliqués à résoudre et à incorporer, dans un monde où il faut que tout se fasse et se construise le plus vite possible, où tout évolue de manière accélérée. Nous pouvons nous attendre à ce que les prix au m2 augmentent à moyen terme, et même à long terme eu égard à la projection de l’évolution démographique du pays.
Nos objectifs d’ici 2020
Puisque les émissions de CO2 d’un bâtiment sont pour l’heure inévitables, il faudrait adopter un plan environnemental de compensation. La conception de bâtiments passifs permet aujourd’hui de limiter les émissions CO2 à des valeurs inférieures à 27 grammes par m2 habitable par jour. Imaginez donc que pour chaque bâtiment construit et chaque m2 habitable développé, nous plantions des arbres qui viendraient compenser l’émission de CO2 des bâtiments. Pourquoi ne pas réserver des terrains sur lesquels nous planterions ces végétations pour ensuite construire autour? Outre la diminution de la pollution, l’augmentation de la qualité de l’air et l’embellissement du paysage urbain, ces parcs seraient un patrimoine pour les générations futures. Cependant, un tel plan ne pourrait se passer du parrainage étatique ou communal. Il y a quelques années, nous avons essayé de travailler avec l’administration de l’environnement afin d’organiser une éventuelle collaboration, mais malheureusement sans succès. Nous allons essayer de donner l’exemple afin de motiver les communes et organisations environnementales d’aller dans ce sens…
Les bâtiments sont aujourd’hui peut-être peu gourmands en énergie mais ils n’intègrent pas pour autant l’aspect écologique dans le sens où les matériaux utilisés pour leur construction, souvent non-recyclables, sont de grands consommateurs de matières premières telles que le pétrole, et sont donc nuisibles pour l’environnement. L’une des possibilités pour sortir de ce paradoxe serait de favoriser la plantation et exploitation de matériaux écologiques. Pourquoi ne pas transformer des hectares de champs non exploités en champs de chanvre industriel par exemple pour, d’une part, absorber le CO2 excessif de l’environnement, pour ensuite pouvoir le stocker sous forme d’isolant sur les façades des bâtiments ? Ceci permettrait certainement de diminuer l’empreinte écologique et d’énergie grise contenue dans les enveloppes thermiques des bâtiments. Elargissons ensemble la construction énergétiquement efficace au concept de la construction durable. Allons au-delà des initiatives écologiques actuelles!

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