PSF: le Grand-Duché devra se réinventer

La conférence annuelle de l’APSFS, l’Association des PSF de support, du 26 novembre dernier était l’occasion idéale pour dresser un bilan de ce statut qui fait toujours parler de lui après pourtant plus de dix ans d’existence. Thierry Seignert, directeur général  d’IBM Services Financial Sector et président de l’Association des PSF de Support, en est convaincu: cet outil non-négligeable de notre paysage économique doit évoluer. Il avance quelques pistes dans cette interview.
 
Le statut PSF, cadre législatif relatif aux Professionnels du Secteur Financier, a été créé il y a plus de 12 ans. Est-il encore nécessaire d’en discuter?
La loi encadrant le statut PSF a très peu évolué depuis 2003. Doit-elle rester telle quelle, sachant que le monde change? Le marché actuel est extrêmement globalisé et le Luxembourg a pris le parti d’une large présence internationale: certaines de nos banques couvrent l’Asie ou les Etats-Unis et compétitivement, nous sommes tout de même le second pays en termes de fonds. Cet écosystème très favorable du Grand-Duché doit être protégé. Nous – Association des PSF de support (APSFS) – pensons que cette régulation doit s’adapter à l’époque actuelle. En cela oui, il est nécessaire d’en discuter.
A-t-on des preuves que cette régulation est un avantage compétitif pour le pays?
Ce secteur représente 9.000 employés et génère un milliard de chiffre d’affaire. Il est un élément reconnu et non-négligeable de notre paysage économique. Bien sûr, il aura toujours ses détracteurs, le voyant comme un frein à la compétitivité. Mais je ne suis pas de leur avis: je suis un supporter optimiste de cette régulation qui permet de travailler en confiance avec des sociétés IT et des fournisseurs.
Quelles sont les mesures à prendre pour moderniser ce statut?
Premièrement, il faut permettre aux banques d’avoir des fournisseurs de services à l’agrément PSF plus competitifs financièrement. C’est une priorité pour la protection de l’emploi et du business du pays. Deuxièmement, il faut autoriser les PSF à s’affranchir de certaines obligations légales qui sont parfois lourdes pour un retour plus limité.
Nous avons en conséquence fait quelques propositions au gouvernement afin d’assouplir cette législation. D’abord, nous souhaiterions la création d’un statut «volontaire» allégé de certaines contraintes qui se rapporterait à des compagnies qui ne sont pas en ligne avec le cœur de la loi des PSF du 2 Aout 2003.
De plus, nous désirons que les obligations en protection de données collent plus aux tendances internationales, et ce pour attirer de façon proactive des investisseurs étrangers. Par ailleurs, nous voulons une régulation par types d’activités, et non plus par entreprises au sein même d’une société. Il n’est pas normal qu’une firme de vente de logiciels IT soit soumise aux mêmes obligations légales qu’une société qui gère l’informatique d’une banque.
Pierre Gramegna, ministre des Finances, nous a confirmé pendant notre conférence annuelle que le gouvernement était prêt à travailler avec nous vers un statut «moins régulé». Il a déclaré que nous n’aurions sans doute pas de difficulté à trouver des solutions plus flexibles, le tout grâce à des échanges fructueux préalables avec la CSSF.
Comment prévoyez-vous l’évolution de ce statut?
La loi réglementant les PSF doit changer, c’est sûr. Mais deux questions doivent être posées dans cette transformation. D’abord, où le secteur financier du Luxembourg veut-il se retrouver sur l’échiquier mondial de la finance dans le futur? Ensuite, «Pourquoi voulons-nous être reconnus dans les prochaines années?», Une fois ces questions posées et analysées, par le gouvernement et les acteurs du domaine, le cadre règlementaire des PSF pourra alors être revu de manière structurelle. De façon tactique, les propositions d’évolution que je viens juste d’exposer sont des réformes qui peuvent être rapidement mises en place.
En ce moment, le Luxembourg vit un changement. Il doit réagir, se positionner au mieux pour le futur. Les modèles que nous avons eus jusqu’ici ne sont plus les modèles de demain. Le Grand-Duché devra se réinventer, comme il l’a toujours fait par le passé. Il lui faudra trouver d’autres axes de développement: les Fintech, la sécurité et confidentialité des données en sont le parfait exemple. L’expertise et la notion de services seront toujours les assises de nos entreprises; la promotion à l’étranger devra continuer à se faire et certaines sociétés le font déjà très bien. J’ai le souvenir d’un patron de banque qui un jour m’a dit: «Mon marché n’est pas entre Thionville, Arlon et Trèves. Mon marché c’est la planète Terre». Cette ambition, nous sommes capables d’en faire notre leitmotiv. SoM

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