Oui à la formation continue, mais de façon réfléchie

L’IUIL, ou Institut Universitaire International Luxembourg, entend soutenir l’économie en enrichissant les compétences. «Nous voulons favoriser le développement des organisations au travers de leurs collaborateurs», explique Pol Wagner, directeur de l’IUIL. «Nous voulons que les organisations repensent leur manière de recruter, leur façon de faire évoluer le collaborateur, de l’envoyer en formation continue pour qu’il apprenne vraiment quelque chose et qu’il transfère les acquis de la formation dans sa pratique professionnelle». Entretien.
L’IUIL est en charge de plusieurs missions. La première d’entre-elles est la formation continue universitaire et postuniversitaire. L’IUIL développe de façon systémique des formations en identifiant d’abord en amont les besoins en formation pour répondre aux spécificités de tel secteur économique ou de telle entreprise ou organisation. Les formations qui rencontrent le plus de succès en nombre mais aussi du point de vue de la qualité sont celles qui sont conçues sur mesure. «Nous tenons compte des contraintes spécifiques à chaque secteur ou organisation. Cela prend beaucoup de temps pour identifier les besoins en formation», développe Pol Wagner. «Lorsque nous proposons sur le marché une formation trop généraliste, c’est là que nous rencontrons des problèmes. A partir du moment où nous concevons des formations sur mesure pour les secteurs ou les organisations, cela fonctionne».
Dans ce contexte, un défi auquel l’Institut est confronté actuellement est la demande de plus en plus croissante des organisations des secteurs privé et public de revoir à la baisse le nombre de jours de formation en présentiel. Pol Wagner explique: «Par exemple, la formation en management pour le secteur hospitalier a été organisée jusqu’à aujourd’hui en tenant compte d’un format de 30 jours de formation en présentiel. Sur demande du secteur, nous avons revu à la baisse le nombre de jours de formation en présentiel et nous sommes passés à 20 jours». La différence entre les 20 et les 30 jours de formation est compensée par des activités d’apprentissage à distance. L’IUIL recourt au blended learning, aussi appelé apprentissage hybride. C’est une approche combinée entre des jours de formation en présentiel, d’une part, et de l’apprentissage à distance, d’autre part. «Nous avons mis en place une plateforme pédagogique que nous utilisons dans presque toutes nos formations. Cela implique que les participants à nos formations puissent déjà consulter, en amont des jours de formation en présentiel, des documents, des présentations PowerPoint, qu’ils puissent se préparer au moyen d’exercices autocorrectifs, etc. Lorsqu’ils viennent en formation, ils sont plus préparés. En aval de la formation, ils peuvent continuer à consulter cette plateforme et télécharger les documents qui les intéressent. Notre objectif est de maximiser le transfert des acquis de la formation dans la pratique professionnelle au travers de ces activités à distance».
Bien sûr, ces changements impactent également les formateurs et leur façon de donner cours. Ils deviennent davantage des accompagnateurs pour les apprenants. L’IUIL les guide dans ce changement au travers de formations notamment.
 
 
Apprendre gratuitement à créer son plan d’affaires
A côté de la plateforme dédiée aux formations de l’IUIL, deux plateformes pédagogiques gratuites ont aussi été mises en place. Elles sont de plus en plus utilisées. La première est la plateforme «businessplan.lu». Elle permet, si vous avez le projet de créer une entreprise au Luxembourg, de concevoir votre plan d’affaires en ligne. «Nous vous posons toutes les questions qu’un banquier ou un investisseur vous posera aussi», dit en souriant Pol Wagner. «Vous pouvez par après imprimer votre plan d’affaires bien structuré et venir avec celui-ci lors de votre première rencontre avec votre banquier par exemple». Depuis 2012, date de la dernière refonte de la plateforme, jusqu’à aujourd’hui, près de 50.000 personnes ont visité la plateforme. «Nous avons été sollicités par des banques de la place financière travaillant avec des PME luxembourgeoises. Les conseillers PME suggèrent à leurs clients de recourir à cette plateforme pour que par après, ils viennent avec un plan d’affaires déjà bien préparé et surtout un plan d’affaires qu’ils ont élaboré eux-mêmes.».
La deuxième plateforme publique mise en place est celle de «business-learning.lu». Elle permet, également en vue de la création du plan d’affaires, de planifier presque soi-même son apprentissage. Elle est conçue de façon e-learning, très pédagogique, avec des exercices d’auto-évaluation. Il est donc possible de tester ses compétences techniques lorsque l’on a bien répondu aux différentes questions et bien consulté les différents chapitres. «C’est un peu comme un livre, mais plus facile à consommer», compare Pol Wagner.
 
 
Encourager la formation
A côté de ces approches d’apprentissage alternatives, l’Institut travaille depuis plusieurs années sur le développement des compétences au sein des organisations. Dans ce contexte, Pol Wagner qualifie l’IUIL de «laboratoire expérimental» au sein duquel les approches RH permettant le développement des compétences sont testées. Ceci allant des entretiens de développement professionnels à la mise en place de plans de formation individualisés. Une question se pose: Comment peut-on évaluer les collaborateurs pour les faire évoluer positivement dans leur carrière professionnelle? Cette question concerne toutes les organisations indépendamment de leur secteur d’activité. Pol Wagner voit aussi cela en relation avec le texte de loi portant sur la modernisation du secteur public, où l’on veut aussi introduire des entretiens de développement. «En ce qui concerne la formation continue au sens large, il y a lieu de constater que tout le monde est envoyé à la même formation alors qu’une personne n’a peut-être pas besoin de faire cela mais plutôt de faire des choses qui ne sont pas proposées». L’IUIL est plutôt intéressé par un développement individualisé. Bien sûr, cela prend du temps. «Nous sommes une petite équipe d’une vingtaine de personnes et nous observons déjà que cela est chronophage. Mais si vous ne le faites pas, vous n’allez pas réussir à développer votre organisation. Le développement de votre organisation passe par celui de vos collaborateurs».
Même quand les responsables d’entreprises envoient leurs collaborateurs en formation continue, il n’est nullement garanti qu’il y ait un retour sur investissement pour l’organisation. Surtout quand le collaborateur s’est fait forcer la main. C’est aussi démotivant pour le formateur que pour le reste du groupe. «Je vous envoie en formation continue, je ne vous fixe pas d’objectifs d’apprentissage, vous n’allez pas utiliser cette formation pour continuer à améliorer par après vos pratiques professionnelles. Vous allez revenir, rien ne va changer. Dans nos formations continues, nous ne proposons pas à nos apprenants de passer un examen théorique. Nous les faisons à la place travailler sur un projet professionnel très concret. Celui-ci est destiné à être mis en place dans l’organisation. Il est discuté et validé avec la direction de l’entreprise pour préparer le terrain et s’assurer qu’il s’agit bien d’un projet en cohérence avec la formation de l’apprenant et les objectifs de l’organisation. Un an plus tard, nous nous permettons de retourner dans l’organisation pour poser des questions. Nous voulons savoir pourquoi cela s’est bien passé ou pourquoi le projet n’a pas été implémenté. Le retour sur investissement de la formation continue nous intéresse énormément, tant du point de vue de l’apprenant que de celui de l’organisation qui finance».