Envers et contre… beaucoup

Le suspens aura duré jusqu’au bout. Au départ, tout semblait plié, les instances européennes ayant décidé de rendre le processus de la désignation du futur candidat à la présidence de la Commission européenne plus transparente, plus démocratique.
Dès lors, Jean-Claude Juncker, candidat investi par le Parti Populaire Européen, grand gagnant de ces élections européennes, devait tout naturellement obtenir l’aval des 28 dirigeants de l’UE pour endosser le costume de président de la Commission européenne, et ce, malgré les sensibilités différentes des uns et des autres.
Que nenni. Les rouages sibyllins de la machine européenne auront une nouvelle fois montré les limites du mécanisme institutionnel de l’UE, et les bonnes intentions affichées en amont balayées d’un revers de main par les chefs d’Etat et de gouvernement des pays membres, constituant le Conseil européen. En effet, plusieurs d’entre eux ont manifesté haut et fort leur hostilité envers Monsieur Juncker, voyant en lui un «homme du passé» et un «alcoolique».
Parmi les principaux trublions, David Cameron, Premier ministre de la très eurosceptique Grande-Bretagne, mais également Viktor Orban, «semi-dictateur» hongrois, rejoints au départ par Mark Rutte, Premier ministre des Pays-Bas, et Fredrik Reinfeldt, Premier ministre suédois, qui se sont par la suite ravisés. Au milieu de cette foire d’empoigne, les dirigeants du tandem franco-allemand aux abonnés (quasi) absents, une fois n’est pas coutume. Résultat des courses, au lieu de privilégier l’habituel consensus, le Conseil européen a dû procéder à un vote, qui s’est soldé par une écrasante victoire des pro-Juncker, mais qui aura une nouvelle fois affaibli la crédibilité des institutions européennes.
A avoir voulu frapper en dessous de la ceinture avec entêtement et brandi des menaces à tort et à travers, David Cameron a suscité un réflexe pro-Juncker chez ses homologues, et le soutien des socio-démocrates, tapissés dans l’ombre, à commencer par François Hollande et Matteo Renzi, président du conseil italien, qui espèrent en contrepartie une inflexion de la politique suivie. Ainsi, au final, le Royaume-Uni se retrouve plus que jamais isolé sur la scène européenne, voire même poussée vers la sortie, sans doute pour le plus grand bonheur de tous.  PhR

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