Une matière grise à exploiter
Créé par règlement grand-ducal le 22 avril 1974, l’Institut Universitaire International Luxembourg (IUIL) a pour principale vocation la formation continue universitaire, à côté de l’Université qui se positionne plutôt comme un acteur de la recherche et de la formation initiale académique. Il occupe, depuis 2002, le château de Munsbach et emploie une vingtaine de personnes.
Interview de Pol Wagner, directeur.
Selon l’article 3 de la convention d’établissement, le rôle de l’IUIL est de contribuer au développement des compétences des collaborateurs par des activités d’enseignement de type formation continue à caractère universitaire pour les secteurs public et privé, de créer et de mettre en place des formations destinées à un public national mais aussi international, ainsi que lancer de nouvelles initiatives. «Au Luxembourg, nous n’avons, pour autant que je sache, pas de matières premières. En revanche, nous avons de la matière grise qui est la seule que nous puissions exploiter davantage dans les années à venir. C’est pourquoi la devise de l’IUIL est de soutenir l’économie luxembourgeoise en développant les compétences sociales et techniques des entreprises au travers de leurs collaborateurs», explique Pol Wagner.
La volonté qui se cache derrière cette assertion est que les programmes de formation suivis à l’IUIL soient profitables, non seulement pour l’apprenant, mais aussi pour l’organisation qui finance ces cours.
Tout commence par une bonne identification des besoins en formation continue qui existent dans le secteur ou directement dans les entreprises. De cette identification découle la conception d’une maquette pédagogique «qui tienne la route» en impliquant les décideurs et les collaborateurs concernés. L’approche consiste ensuite à élaborer un projet professionnel destiné à être implémenté dans l’organisation plutôt que d’apprendre des pages par cœur pour les restituer lors d’un examen, et ce, toujours dans une optique de retour sur investissement pour l’apprenant et pour l’entreprise. Comme le souligne le directeur: «L’organisation doit tirer profit de cette formation car l’investissement qu’elle représente en termes de droits d’inscription et de journées de travail non prestées n’est pas négligeable ».
Une douzaine de formations sont actuellement en place à l’IUIL et une demi-douzaine de formations supplémentaires sont à l’étude.
A titre d’exemple, la formation managériale pour le secteur hospitalier, conçue sur mesure il y a sept ans, en est à sa quatrième session. Elle est la première où l’idée de projet professionnel destiné à être mis en oeuvre dans l’entreprise a été pratiquée suite à une identification des besoins réalisée en collaboration avec les directeurs d’hôpitaux, les responsables des ressources humaines et des collaborateurs du niveau n-1. Cette formation est orchestrée, en grande majorité, par des acteurs issus du terrain. Et pour pallier les éventuelles lacunes pédagogiques de ces intervenants, l’IUIL a conçu une formation intitulée ‘Train the Trainer’ qui profite d’ailleurs en premier lieu à ses propres formateurs.
Une autre formation, organisée avec le soutien de la Cour des comptes européenne et visant, quant à elle, un public national et international, est celle de ‘Public Performance Auditing’. L’objectif en est d’apprendre à articuler un audit concernant la dépense des deniers publics, non seulement autour de critères technico-financiers, mais en tenant aussi compte des critères de performance. Trois sessions de quinze participants ont déjà eu lieu.
Un troisième exemple est la formation de gestion d’un cabinet d’avocat, une formation agréée par le Barreau de Luxembourg.
Si la formation est le pilier de l’IUIL, ses domaines d’activité sont au nombre de trois, dont la recherche appliquée portant sur l’ingénierie pédagogique pour adultes et sur la thématique des ressources humaines.
L’IUIL a créé un observatoire des compétences comportant deux axes distincts: l’axe ‘Tools’ et l’axe ‘Analyses thématiques’ aux objectifs spécifiques et complémentaires.
Les analyses thématiques ont pour but d’identifier les compétences actuelles et futures, requises par certains secteurs de l’économie luxembourgeoise afin de permettre la mise en œuvre de formations initiales ou continues en adéquation avec les besoins des entreprises ou des administrations.
Dans l’axe, bilans de compétences ou ‘Tools’, le propos est d’identifier et tester des instruments de bilans pour définir et pour réaliser des profils de compétences sociales et techniques afin de développer une expertise luxembourgeoise mobilisable dans différents contextes. De ce test sera issu un comparatif permettant de considérer les instruments les plus adaptés aux contextes de leur utilisation et aux objectifs poursuivis. Les contextes dans lesquels les instruments sont testés sont variés. Ainsi des organisations comme le Centre Hospitalier Emile Mayrisch d’Esch-sur-Alzette, de Verband Group, le ministère de l’Economie, Naturata ou encore Stëftung Hëllef Doheem participent au projet. Avec la Stëftung Hëllef Doheem par exemple, il s’agit de mettre en place un plan de succession. En effet, il faut prévoir le remplacement d’une trentaine de cadres prenant leur retraite dans les quatre prochaines années en favorisant la promotion interne. En dressant le profil des compétences économiques et sociales des cadres en place et en les juxtaposant sur ceux des collaborateurs, l’IUIL aide la fondation à trouver des successeurs potentiels, qu’elle pourra ensuite préparer à leur nouvelle tâche par le biais de la formation continue et du tutorat.
Qualiform est un autre projet de recherche appliquée qui vise à améliorer la qualité de la formation continue au Luxembourg. Pour ce faire, des études impliquant des acteurs de la formation sont menées afin de mieux appréhender les facteurs pouvant influencer la qualité d’une formation. La première étude menée en 2013 portait sur les compétences du formateur, les résultats sont disponibles sur le site internet de l’IUIL.
Les outils pédagogiques constituent le troisième domaine d’activité. L’Institut dispose de sa propre plateforme pédagogique au sein de laquelle chaque formation dispose d’un espace dédié. Ceci permet d’amener davantage de flexibilité dans les formations proposées grâce à une approche «blended learning» qui consiste à mixer l’enseignement en salle avec l’enseignement à distance. Ainsi, ceci permet d’optimiser les temps passés en formation en salle en combinant la souplesse d’un accompagnement sur une plateforme en ligne avec la dynamique de groupe et les interactions d’une formation en salle.
De plus, l’IUIL a lancé, au cours des dix dernières années, deux sites internet dédiés aux créateurs d’entreprise: www.businessplan.lu qui propose un soutien gratuit, en mode avancé ou simplifié, en français, anglais, allemand et portugais, pour la création d’un plan d’affaires personnalisé et www.business-start.lu, qui offre une introduction à la création d’entreprise et aux techniques de comptabilité, de gestion et d’analyse financière, à travers des exercices, des solutions modèles et une approche ludique.