The place to be
Un cadre réglementaire précurseur, des infrastructures techniques de pointe, des capacités d’accueil à la hauteur du défi Big Data, une connectivité exemplaire aux réseaux internationaux et l’esprit d’innovation, le Luxembourg, qui était il ya une décennie à peine un ‘nowhere’s land’ en termes de technologies de l’information et de la communication, figure aujourd’hui parmi les pays les plus avancés au monde. Et l’enjeu est de taille…
Le point avec Xavier Bettel, premier Ministre et ministre des Communications et des Médias.
© 2013 SIP / Thierry Monasse, tous droits réservés
Pourriez-vous dresser un état des lieux de la situation actuelle au Grand-Duché en matière de TICs et de connectivité?
Je constate que le Luxembourg est aujourd’hui perçu à l’étranger comme un centre d’excellence en matière de TICs. Ce sont tant les benchmarks qui le confirment que l’implantation récente de nombreuses nouvelles sociétés, que ce soit dans le secteur du gaming ou autre. Le Luxembourg figure ainsi dans le top 10 des pays les mieux connectés au monde, selon une étude récente de l’Union internationale des télécommunications. Ce qui nous réjouit le plus, c’est qu’à côté de certaines grandes enseignes qui continuent à se développer ici et à augmenter leurs effectifs, telles que Amazon ou PayPal, de plus en plus d’entreprises plus petites, moins connues, ou start-ups s’intéressent au Luxembourg, sans que nous ayons eu besoin d’aller les chercher. C’est à nos yeux la preuve que le secteur commence à s’étoffer et qu’un écosystème commence à se créer, ce qui est ce que nous recherchions et ce qui est indispensable pour développer le secteur durablement.
Vos prédécesseurs avaient élaboré une stratégie visant à positionner le Luxembourg comme un centre d’excellence pour les médias et les nouvelles technologies, notamment en garantissant à court terme l’accès à l’ultra-haut débit sur tout le territoire. Quel est l’enjeu économique pour le pays? Que reste-t-il à faire? Quels seront les mesures et les moyens déployés par le nouveau gouvernement?
L’enjeu est en effet très important. Vu le poids économique du secteur -le commerce électronique a généré en 2013 des recettes de 950 millions d’euros pour l’Etat, mais on sait qu’une grande partie de ces recettes disparaîtra à partir de 2015 en raison du changement réglementaire européen concernant la TVA sur les services électroniques-, il faut évidemment travailler en continu pour le développement du secteur et s’assurer que l’infrastructure technique, sans laquelle le secteur ne peut se développer, soit à la pointe du progrès, ce qui est bien le cas aujourd’hui.
La stratégie nationale pour un accès au ultra-haut débit est une étape importante dans le développement du Luxembourg en tant que pays ‘high tech’. Maintenant que nous avons réussi à améliorer de manière impressionnante la connectivité internationale du pays aux autoroutes de l’Internet et à augmenter la capacité d’accueil et la qualité de nos centres de données, grâce à une mobilisation tant des acteurs publics que privés, il faut maintenant également développer la connectivité au niveau national. Il s’agit certes prioritairement d’assurer une connectivité de pointe aux zones industrielles et commerciales, mais également à terme à chaque foyer. L’objectif n’est pas uniquement d’offrir un accès à chaque ménage à des services gourmands en bande passante, tels que le streaming audiovisuel en haute définition pour visionner la télé via Internet. Il s’agit plutôt de faire en sorte que, peu importe où vous vous trouviez dans le pays, vous ayez accès à un Internet tel que vous puissiez utiliser potentiellement tous les services ou bénéficier de toutes les opportunités que présente le Cloud Computing, que ce soit en favorisant le télétravail ou la création d’une start-up innovante à partir du canapé de son salon.
Une telle infrastructure est ainsi un investissement dans l’avenir de notre pays, dans les capacités d’innovation et d’efficacité qu’offrent les nouvelles technologies. Elle est également la condition sine qua non pour développer les activités qui se greffent sur les réseaux, que ce soit la distribution de contenus, le traitement et la valorisation de données en toute sécurité, ou tout autre opportunité liée au phénomène du Big Data, toutes des pistes de diversification économique et de modernisation de notre pays.
L’ancien ministre, Luc Frieden, a annoncé, il y a quelques mois, la création d’une task-force pour le développement du secteur des TICs. Cette initiative sera-t-elle maintenue en la forme ou subira-t-elle des changements par rapport à l’idée de départ? Concrètement, en quoi consistera-t-elle et comment agira-t-elle?
La coopération avec le secteur privé est une priorité pour moi. Un plan d’action ICT sera élaboré dans les prochains mois auquel le secteur privé sera associé sous une forme qui est en train d’être définie.
Le déploiement de la fibre optique est un argument de poids pour attirer de nouveaux acteurs économiques. Où en est-on? Quel rôle les communes ont-elles à jouer?
La disponibilité de l’ultra-haut débit a un impact important sur le développement économique. La position du Luxembourg peut être jugée excellente puisque 85% de la population peut aujourd’hui avoir accès à une offre ultra-haut débit. Il faut souligner que ce taux de couverture très élevé est surtout atteint grâce aux câblodistributeurs qui, à eux seuls, couvrent plus de 60%.
Je sais que les communes ont été informées dès 2011 des mesures qu’elles peuvent prendre pour soutenir le déploiement de l’ultra-haut débit. En premier lieu, elles peuvent veiller à ce que des infrastructures d’accueil pour réseaux ultra-haut débit, c’est-à-dire notamment des gaines, soient prévues en nombre suffisant dans le projet d’exécution d’un plan d’aménagement particulier ‘nouveau quartier’. Ensuite, elles peuvent négocier des conventions de partage avec des opérateurs lorsqu’elles entreprennent des travaux d’infrastructures sur leur propre territoire. Un tel partage d’infrastructure permet de réduire les coûts de déploiement de l’ultra-haut débit de manière significative. Finalement, pour assurer la distribution de l’ultra-haut débit à l’intérieur d’un immeuble collectif, une problématique et un facteur de coût souvent sous-estimés, les communes peuvent rendre le pré-câblage obligatoire. Ces deux dernières dispositions se retrouvent toutes dans le règlement-type sur les bâtisses, les voies publiques et les sites.
A noter qu’avec ces mesures, le Luxembourg a été un précurseur étant donné qu’une proposition législative est actuellement discutée au niveau européen qui va exactement dans la même direction et qui tend à les rendre obligatoires.
Le développement du Cloud Computing nécessite la création d’un climat de confiance. Quels effort récents pour renforcer la sécurité le pays a-t-il faits tant sur le plan des infrastructures que sur le plan législatif? Quels sont les efforts à accomplir encore?
Une loi pour la protection des données en cas de faillite de l’hébergeur a été créée, ce qui est un important facteur de confiance. De plus, une loi sur l’archivage électronique est sur le point d’être adoptée.
En ce qui concerne les infrastructures, le développement des centres de données TIER IV, c’est-à-dire le niveau le plus élevé en termes de sécurité, se poursuit. Ainsi, LuxConnect est en train de construire son quatrième data center à Bettembourg.
Un partenariat public-privé vient d’être signé entre l’Etat et la firme SES pour le développement d’une nouvelle plateforme satellitaire européenne. Pourquoi une plateforme supplémentaire?
Le projet Electra est un projet de l’Agence Spatiale Européenne dont le Luxembourg est un des principaux contributeurs. L’objectif est le développement, par l’industrie européenne, d’une plateforme satellitaire géostationnaire très innovante dotée d'une propulsion électrique au lieu d'une propulsion chimique conventionnelle. Ce nouveau type de satellite est plus léger au lancement et permet ainsi à l’opérateur de faire des économies substantielles lors du lancement du satellite. SES est le premier contractant de l’ESA pour le projet Electra, ceci dans le but de pouvoir profiter à l’avenir de la réduction des coûts devant en résulter. Je me réjouis que SES joue une nouvelle fois le rôle d’un précurseur en matière de nouvelles technologies et que la capacité d’innovation du Luxembourg est ainsi confirmée grâce à ce projet.