Nouvelle loi et réglementation sur l'accessibilité en perspective

Il reste encore beaucoup à faire pour rendre nos villes plus accessibles aux personnes à mobilité réduite. Combat heureusement aidé par la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées qui a induit la révision de la loi grand-ducale de 2001 sur l’accessibilité au Grand-Duché.
Elodie Marchesin, ergothérapeute à l’ADAPTH, nous explique l’importance de cette nouvelle loi et en trace même quelques contours.

 

Qu'est-ce qui motive une nouvelle loi et réglementation?

C'est une des retombées directes de l'entrée en vigueur, le 28 juillet 2011, de la loi approuvant la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées.

Afin de faciliter la transposition de cette convention, le ministère de la Famille et de l’Intégration, en tant que coordinateur pour les politiques en faveur des personnes handicapées, a élaboré un plan d'action ensemble avec la société civile et les décideurs publics. Parmi les nombreuses mesures, ayant comme objectif principal l'inclusion des personnes handicapées dans notre société, figure la mise à jour de la réglementation nationale pour l’accessibilité des lieux ouverts au public qui date de 2001.

 

La loi et la réglementation de 2001 ne sont donc plus satisfaisantes?

Une des limitations importantes de cette loi est qu'elle ne s'applique qu'aux projets de nouvelle construction et de rénovation importante d'un lieu ouvert au public relevant de l'Etat, des communes et des établissements publics, et visent plus particulièrement les fonctions accessibles au public. Ce ne sont malheureusement qu'une partie des lieux qui sont susceptibles d'être fréquentés par les personnes à mobilité réduite, beaucoup de lieux et d'activités leur sont aujourd'hui encore inaccessibles.

Ainsi il n'existe aucune obligation pour rendre accessible les bâtiments du domaine privé accueillant du public comme les commerces, les restaurants ou encore par exemple les cabinets médicaux ou d'avocat. Le logement n'est pas non plus visé. La demande de logements accessibles ne fait qu'augmenter avec la population vieillissante et malheureusement, ou étonnamment, l'offre est quasiment inexistante. Aujourd'hui encore, des résidences sont construites avec des ascenseurs inutilisables en fauteuil roulant.

Au-delà de ces limitations, le règlement actuel comporte des lacunes telles que la prise en charge des déficiences sensorielles. Ainsi, peu de solutions sont proposées pour faciliter l'orientation des personnes aveugles ou malvoyantes, ou bien encore pour la communication avec des personnes malentendantes ou sourdes.

Depuis 2001, les techniques et concepts en matière d'accessibilité ont beaucoup évolué, d'ailleurs il ne faudrait plus parler d'accessibilité, mais de conception universelle. Il faut construire des lieux qui soient sécuritaires, sains, adéquats et agréables à utiliser par tous les membres de la société.

 

La nouvelle loi sera donc aussi élargie au domaine privé?

Cela me paraît inéluctable puisque la convention demande d'assurer la pleine et égale jouissance de tous les droits de l'homme par les personnes handicapées. Le logement, le travail, les loisirs et les services doivent leur être accessibles.

La nouvelle loi devrait en tenir compte et inclure aussi les établissements privés recevant du public, certains lieux de travail, le logement collectif, et, pourquoi pas, aussi le logement privé.

 

Les bâtiments existants sont aussi concernés?

Bien entendu puisqu'ils comptent pour la grande partie du patrimoine existant. C'est en fait le défi majeur, que ce soit du point de vue technique ou financier. Il faudrait définir des priorités et imposer, par exemple, une date limite pour la mise en conformité des bâtiments existants.

En guise de bon élève, l’on peut citer la législation française sur l'accessibilité. Celle-ci définit une durée de mise en conformité de six à dix ans en fonction des catégories de bâtiments. La réalité du terrain montre toutefois que ces délais ne seront pas respectés en France.

 

Ces nouvelles contraintes risquent de ne pas plaire à tout le monde!

Au contraire, nous constatons tous les jours une demande de plus en plus forte pour du conseil en matière de construction accessible.

Les premiers demandeurs sont les communes. La conception universelle fait maintenant souvent partie du cahier des charges dans tous les projets de construction. Les bureaux d'architectes et d'ingénieurs l'incluent dans leur offre. C'est, entre autres, ce que la Ville de Luxembourg fait et c'est un bon exemple à suivre.

La réglementation actuelle n'est pas assez poussée et précise pour donner des indications claires aux concepteurs. Aujourd'hui, les solutions mises en place vont déjà bien plus loin que ce qui est demandé par la réglementation. Ce qui manque, ce sont des prescriptions claires, uniformes et applicables facilement, la nouvelle réglementation devra aussi pouvoir satisfaire les professionnels du bâtiment.

 

Quel est le rôle de l'ADAPTH dans tout ceci?

Le ministère de la Famille et de l'Intégration a nommé l’ADAPTH "Centre de compétence national pour l'accessibilité des bâtiments" conformément à une mesure du plan d'action.

C’est dans cet esprit que l'ADAPTH a d'ores et déjà rédigé une proposition concernant les caractéristiques techniques minimales à respecter pour que le ministère puisse l’intégrer dans le nouveau règlement sur l'accessibilité.

L'ADAPTH participera naturellement à la phase de concertation au sujet de la réglementation entre les ministères concernés, les professionnels du bâtiment et la société civile.

 

Quand pensez-vous que la loi et la réglementation entreront en application?

2013 ou 2014 nous semble réaliste. C'est un processus fort long et compliqué.

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