«Il est grand temps que l’Eurohub Sud arrive!»
Jean Gomez vient de prendre la direction des opérations de la société Lorry Rail, sous la direction de Thierry Le Guilloux qui a pris la présidence de Viia, la filiale de SNCF Geodis qui gère toutes les autoroutes ferroviaires d’Europe.
Présent depuis le lancement de Lorry Rail au sein de la société, Jean Gomez revient, pour LG Magazine, sur l’aventure de l’autoroute ferroviaire franco-luxembourgeoise et évoque pour nous l’arrivée de l’Eurohub Sud tant attendu.
Pouvez-vous nous présenter brièvement Lorry Rail et sa vocation?
Depuis 5 ans, Lorry Rail a toujours la même vocation qui est celle de charger sur des trains les semi-remorques qui transportent des marchandises entre la péninsule Ibérique et le nord de l’Europe.
Depuis 2007, date de la création de Lorry Rail, jusqu’à aujourd’hui, nous opérions sur une seule ligne qui reliait Le Boulou, à la frontière espagnole, à Bettembourg. Cependant, depuis le début du mois d’octobre, nos clients peuvent emprunter une nouvelle liaison entre entre Bettembourg et Helsingborg, en Suède, assurée par Viia, qui s’ajoute à la ligne démarrée l’année dernière par le groupe CFL vers Lübeck au bord de la mer Baltique.
Lorry Rail a fait ses débuts en assurant le transport de fruits et légumes, un genre de transport très spécifique qui demande une certaine vigilance par rapport à la manipulation et au conditionnement des marchandises. C’est un trafic saisonnier intense qui assure des transports du sud de l’Espagne jusqu’en Scandinavie, et qui se déroule de la fin du mois d’octobre jusqu’à la fin du mois d’avril. C’est notamment à l’occasion de cette campagne que nous espérons, cette année, dépasser le cap des 50.000 semi-remorques pris en charge annuellement.
L’atout de Lorry Rail réside surtout dans son emplacement, à Bettembourg…
Il est vrai qu’en termes de logistique, le Luxembourg, dessert une grande partie du nord de l’Europe et Bettembourg, plus particulièrement, est un point très important.
En effet, si nous étions installés en Belgique, nous serions déjà plus décentrés par rapport à l’Allemagne, tandis que si nous étions basés en Allemagne, nous serions, à l’inverse, trop décentrés par rapport à la Belgique et la Hollande.
Cependant, l’atout de Lorry Rail réside surtout dans la solution que nous proposons qui consiste à substituer la route par le rail.
Qu’est-ce que l’autoroute ferroviaire a de plus?
Qu’on le veuille ou non, entre le Grenelle de l’Environnement et les prix du pétrole qui ne cesseront pas d’augmenter puisqu’il se raréfie, je pense que le modèle Lorry Rail sera celui de l’avenir dans la mesure où le rail offre des avantages écologiques et économiques indéniables.
En effet, il faut savoir que pour faire Le Boulou-Bettembourg, chaque camion consomme en moyenne entre 350 et 400 litres de gazole. Sachant que nos convois prennent, à peu près, 250 semi-remorques par jour, cela permet au final une économie de plus de 80.000 litres de gazole par jour!
Par ailleurs, moins de camions sur les routes, c’est aussi une baisse considérable des risques d’accidents. Depuis le début de l’aventure Lorry Rail, nous avons déplacé plus de 100.000 semi-remorques sans aucun accident.
Alors certes, supprimer totalement les camions des autoroutes n’est pas possible, ne serait-ce que parce qu’il y en a tous les ans un peu plus. Pour autant, si on arrive à absorber ce différentiel en le mettant sur les rails, ce sera quand même positif. Mais pour cela nous avons besoin de place.
L’Eurohub Sud, actuellement en construction, pourrait-il pallier ce manque de place?
Assurément! Cette construction est importante pour Lorry Rail car, pour le moment, nous sommes obligés de traiter les trains venant à Bettembourg en deux fois, par demi-train. Nous passons deux heures par trains pour effectuer les différentes manœuvres d’entrée et de sortie des rames de wagons.
La nouvelle plateforme Eurohub Sud nous permettra de faire entrer les trains plus directement et donc de supprimer un bon nombre de manœuvres, représentant ainsi un gain de temps considérable.
Avec quatre convois par jour, nous gagnerons ainsi 8 heures de travail et nous pourrons, à termes, augmenter le nombre le train de façon à passer à un convoi toutes les quatre heures, au lieu d’un toutes les six heures comme c’est actuellement le cas.
On peut donc dire qu’il est temps que cette nouvelle plateforme voit le jour…
Oui, il est grand temps que cet Eurohub Sud arrive car, que ce soit au Sud ou au Nord, les instances politiques n’avaient pas mesuré le développement et l’importance que prendraient Lorry Rail et, plus généralement, le rail.
Certes des agrandissements de terminaux ont été faits, mais nous avons grandi plus vite que les gens ne le pensaient. FC