Former, informer et innover

Membre fondateur et administrateur de l’IFSB, Jean Feyereisen, ancien directeur de la CDC, a été élu président du conseil d’administration de l’institut de formation en mai dernier. Pour LG, il nous raconte l’histoire de l’IFSB et se projette, avec Bruno Renders, actuel administrateur et directeur de l’établissement, sur les nombreux défis qui restent encore à accomplir.

 

Le projet IFSB fête, cette année, ses 10 ans. Quel bilan tirez-vous de cette première décennie d’existence au succès indéniable?

Jean Feyereisen: L’IFSB est né d’un constat que le Groupement des Entrepreneurs et la Fédération des entreprises de construction, à laquelle j’appartenais alors et à laquelle j’appartiens toujours, a fait à la fin des années 90: celui d’un sérieux problème de qualification de notre main-d’œuvre. Nous avions alors longuement réfléchi sur la meilleure manière d’améliorer la qualité de nos travailleurs, ainsi que notre compétitivité. C’est ainsi que nous avons mis sur pied cette idée d’un institut de formation.

L’aventure a finalement débuté en 2002, et, depuis, nous avons formé presque 17.000 personnes, ce qui représente 360.000 heures de formations. De 23 inscrits en 2002, nous sommes passés à une centaine en 2003, pour finir, l’an passé, à plus de 2.800 stagiaires.

Dans les années 2000, nous avons constaté le même phénomène qu’avec les ouvriers dans les années 90, à savoir, un manque de qualité, ainsi qu’un problème de recrutement, mais pour le personnel encadrant. De là est donc venue l’idée d’étendre les offres de formations de l’IFSB pour proposer des formations aussi aux cadres. Ainsi, durant ces dix ans, nous avons aussi réussi, grâce à une direction que je dirais proactive, très dynamique et compétente, à proposer des formations techniques, ainsi que des formations d’encadrement.

Je dois donc dire que le bilan de ces dix premières années est largement positif.

Bruno Renders: Ce qu’il faut savoir, c’est que l’IFSB est un projet qui a été porté par les entrepreneurs et par leurs fédérations professionnelles. Il existe donc une relation directe entre ce que le secteur souhaite, ce dont il a besoin, et la manière dont ces vœux sont mis en œuvre. Ainsi, lorsqu’un entrepreneur a un besoin particulier, il nous appelle et nous répondons à sa demande en faisant du sur mesure pour lui, ce qui apporte une notion de prestation de service dédiée au secteur et aux entreprises.

De plus, notre collaboration avec les autorités publiques dans d’autres domaines, comme la mise en place de nouvelles réglementations, démontrent qu’il existe une vraie relation de bonne intelligence entre les autorités publiques, le secteur de la construction et l’IFSB. On s’entend, on se comprend, et cela joue beaucoup dans la bonne santé et le succès du projet IFSB.

Revenons dans le présent. Quels sont les projets et nouveautés prévus cette année et dans les 10 ans à venir?

Jean Feyereisen: Au niveau des cours, la formation “contrat collectif“ (ndlr: qualification des ouvriers) connaîtra quelques améliorations sur certains modules. Nous développons également d’autres cours, par exemple pour des coffrages standardisés et d’autres nouvelles techniques qui viennent sur le marché comme la préfabrication, et nous voulons étendre nos formations techniques.

Nous avons également des ambitions plus européennes en ce qui concerne notre offre de formations managériales. En effet, nous avons l’intention de faire sortir l’IFSB, déjà largement tourné vers la Grande Région, des frontières luxembourgeoises en développant une école de cadres de la construction avec nos voisins. Il s’agirait, en fait, de réunir toutes les formations d’encadrement qui existent déjà sous un même label et orienté vers la Grande Région.

Cependant, le véritable fil rouge pour la prochaine décennie est le “green building“ et, plus largement, l’intégration réussie de la thématique de la construction durable. Nous allons travailler pour former et informer les gens, innover, et montrer tout ce qu’il y a à faire en matière de construction durable pour, en 2020, avoir des bâtiments à consommation nulle d’énergie, comme l’impose les exigences européennes.

Des projets ambitieux, surtout lorsque l’on sait que les métiers manuels souffrent d’un véritable désamour, notamment de la part des jeunes…

Jean Feyereisen: Ce désintérêt pour les métiers dits manuels est, en effet, un problème que nous prenons très à cœur.
Pour y remédier, nous avons compris qu’il fallait sensibiliser les élèves dans les lycées, ce que l’on fait grâce à différents partenariats avec des lycées techniques, le ministère de l’Education nationale et universitaire et le ministère de l’enseignement supérieur. Nous avons notamment participé à l’élaboration du BTS Conducteur de travaux.
C’est aussi pour cela que nous travaillons en bonne intelligence avec les entreprises qui offrent aux jeunes un stage, une formation et, parfois, une garantie d’emploi non négligeable en ces temps de crise.

Bruno Renders: Dans le secteur de la construction, le capital humain est plus important que dans d’autres secteurs peut-être plus automatisés. Ici, les machines n’ont pas encore remplacé les ouvriers et les hommes de la technique qui représentent encore 50% de la valeur de l’entreprise, d’où la nécessité d’une main d’œuvre abondante et de qualité. Et c’est notre rôle à nous, formateurs comme entreprises, que de faire en sorte que cette main-d’œuvre ne se perde pas.

Par exemple, lorsque l’IFSB propose une formation en alternance, les entreprises s’investissent en embauchant et en accompagnant pendant douze mois un stagiaire qui évolue dans un cadre pédagogique tout en lui donnant le goût de la construction dans ce que cela peut avoir de sympa et de spectaculaire. On est dans la pratique, et je pense que les jeunes d’aujourd’hui, qui sont tout le temps dans le virtuel, ont besoin de pouvoir se lier à des éléments concrets, pratiques.

C’est en leur démontrant tout cela, par nos campagnes d’informations et de sensibilisation que je pense que l’on pourra à nouveau attirer la jeune génération vers les métiers de la construction, et rendre nos ambitions possibles.