«Il reste encore beaucoup à faire au Luxembourg»
Alors que le gouvernement rêve d’un horizon 2017 fait de constructions de maisons uniquement passives, il reste silencieux quant au renouvellement de l’attribution des aides étatiques. Pour LG Magazine, Peyman Assassi, gérant du Bureau d’Expertise Peyman Assassi, revient sur l’échéancier grand-ducal, la situation du Luxembourg au niveau des performances énergétiques, le silence du gouvernement et sa situation d’expert d’ici quelques années.
Le Grand-Duché de Luxembourg vient d’annoncer la mise en place d’un échéancier vers les maisons passives. Pouvez-vous nous définir exactement le terme de maison passive? Quels sont les normes et principes d’une maison passive?
La maison passive, souvent appelée “maison sans chauffage“, repose sur un concept de construction très basse consommation, basée sur l’utilisation de la chaleur passive du soleil, sur une très forte isolation (des murs, des fenêtres, etc…), l’absence de ponts thermiques, une grande étanchéité à l’air ainsi que le contrôle de la ventilation.
Trois critères permettent de déterminer si un bâtiment peut obtenir le label “bâtiment passif / Passivhaus ®“.
Le premier concerne les indices de performance — besoin spécifique d’énergie primaire Qp [kWh/m2 a]; besoin spécifique de chaleur de chauffage qH [kWh/m2 a]; émissions spécifiques de CO2 [kg CO2/m2 a] — qui doivent tous se situer dans la classe “A“ du type de maison concernée (maison individuelle, maison à appartements).
Le second critère impose l’installation d’une ventilation contrôlée avec système de récupération de chaleur.
Enfin, un test d’étanchéité à l’air doit être réalisé pour une différence de pression de 50 Pa entre l’intérieur et l’extérieur du bien immobilier. L’échange d’air sous ces conditions doit rester inférieur à 1,0 1/h pour les maisons “basse énergie“ et 0,6 1/h pour les maisons “passives“.
Cet échéancier est-il réalisable?
Cet échéancier est réalisable, mais va engendrer un coût de construction plus élevé (ndlr: l’augmentation quasiment certaine des prix des fournisseurs d’isolation, des menuiseries extérieures, des installations de chauffage/eau chaude sanitaire, de l’étanchéité à l’air,…), ce qui entraînera alors un prix de vente plus élevé.
Cependant, il est nécessaire afin de faire face aux émissions de dioxyde de carbone et donc à l’effet de serre engendrant les changements climatiques. Le secteur de la construction y porte son poids.
Le texte de l’échéancier parle d’un renforcement des exigences énergétiques. Cela signifie-t-il que, jusqu’à maintenant, le Luxembourg n’était pas assez ferme à ce niveau? Comment et où se situe le Luxembourg du point de vue de la performance énergétique face à ses collègues européens?
Le Luxembourg a adopté relativement tard la EnEV (ndlr: Energieeinsparungsverordnung) allemande. L’Allemagne, l’Autriche, la France, la Suisse et la Suède sont plus avancées et plus précurseurs dans le domaine de la performance énergétique.
Il reste encore beaucoup à faire au Luxembourg notamment et fondamentalement l’adaptation des subventions sur la rénovation ainsi que les formations et agréments des futurs experts dans ce domaine.
Cet échéancier est mis en place alors que le plan d’aides étatique prend fin en décembre et qu’il n’est, pour le moment, pas sûr d’être reconduit. Doit-on alors s’attendre à une baisse significative de la construction et de la rénovation?
D’après nos correspondances téléphoniques avec le ministère de l’Environnement, les aides étatiques ne prendront pas fin en décembre; il s’agira simplement d’une adaptation et, éventuellement, d’une modification. Néanmoins, l’ampleur de ces adaptations n’est pas encore clairement définie.
On ne doit pas s’attendre à une baisse d’activité dans le secteur car il est, et sera toujours en constante augmentation, dû à la demande croissante de logements.
Il y a déjà des exigences minimums à respecter pour construire une maison économique, basse consommation ou passive, et cet échéancier ne fait qu’imposer la construction de maison basse énergie ou passive.
Si l’échéancier est valable pour les bâtiments neufs, rien n’est écrit en ce qui concerne la rénovation. Les demandes d'expertises et de rénovations ne risquent-elles pas de baisser et de mettre ainsi en péril des métiers comme le vôtre?
Non, car il y aura toujours des rénovations de bâtiments de tout type à effectuer, et, lors de ces rénovations, le souci d’économies d’énergie est mis en avant par et pour les particuliers. Il faudra donc toujours, à condition que les changements du Règlement Grand-Ducal n’affectent pas la liaison entre l’expert et la procédure des demandes de subventions étatiques, faire appel à un expert spécialisé afin d’évaluer les mesures nécessaires et efficaces dans la lutte contre le gaspillage d’énergie.