La construction, un secteur en (r)évolution
La construction a toujours été et reste fortement orientée sur la main d’œuvre. Elle subit actuellement le vieillissement de ses effectifs, mais peine à trouver des recrues parmi les jeunes qui en ont une image négative. À tort… car c’est un secteur dynamique, concerné au premier plan en tant que gros consommateur de ressources et émetteur de CO2, par les évolutions liées au développement durable. Interview de Bruno Renders, directeur de l’IFSB.
Que dire aux jeunes pour les inciter à se diriger vers les métiers de la construction? Quelles perspectives le secteur a-t-il à leur offrir?
Alors que le secteur n’a jamais été identifié comme étant très technique, il le devient de plus en plus; et qui dit technique, dit valorisant. Toutes les maisons construites à partir de 2020 devront être passives, voire produire de l’énergie. Les bâtiments intègrent donc de plus en plus de technologie et les techniques de mise en œuvre sont de plus en plus précises. Les bâtiments prennent donc une connotation toujours plus positive sur le plan durable. C’est un élément fort qui devrait permettre aux jeunes de s’intéresser au secteur.
C’est l’objectif du projet Youth and co que de mettre en avant cet aspect durable de la construction…
Youth and co a officiellement pris fin le 31 décembre de l’année dernière en même temps que le projet européen auquel il était lié, mais le Fonds social européen nous a renouvelé sa confiance pour trois ans. Nous avons donc lancé le nouveau projet Building Generation qui, comme son nom l’indique, s’adresse aux jeunes. Nous sommes en train de développer, en partenariat avec le ministère de l’Education nationale, des jeux sans frontière de la construction durable dans les lycées luxembourgeois. C’est une façon ludique et spectaculaire de promouvoir un secteur qui bouge.
Est-ce que, en informant les élèves dans les lycées, l’IFSB n’outrepasse pas un peu sa misssion de formation continue? Est-ce qu’il existe des passerelles entre les deux mondes: formation initiale et formation continue?
Le secteur se mobilise parce qu’il constate que les filières de formation initiales ne permettent pas d’alimenter les entreprises de construction en effectifs suffisants et adaptés aux besoins réels du marché. Ce décalage s’explique par le fait que l’éducation nationale est une grosse machine, qu’il n’est pas toujours facile de faire évoluer parce qu’on touche à du statutaire, à du légal, à des programmes qui doivent faire l’objet de discussions et de négociations. Alors que l’IFSB -c’est son avantage- est plus flexible et est rapidement en mesure de couvrir les nouveaux besoins en formation continue ou initiale.
Nous avons des contacts constructifs avec la ministre de l’Education nationale qui ont pour but de rapprocher l’école de l’entreprise et l’entreprise de l’école. Ces deux mondes ne sont pas concurrents mais complémentaires. Si on veut donner aux jeunes le goût d’entreprendre ou de travailler en entreprise, on doit les mettre en relation de manière structurée et quasi-permanente avec le monde de l’entreprise.
La formation Chef de chantier, dont la première session a débuté en janvier, illustre bien l’interaction qui peut exister entre l’école et l’entreprise. En quoi ce nouveau produit consiste-t-il?
Il s’agit d’un cursus qui vise à former des jeunes à la conduite de projets de construction. L’objectif est de couvrir rapidement les besoins des entreprises en la matière. Nous avons recruté douze jeunes qui seront chacun accompagnés par une entreprise tutrice pendant l’année que dure la formation. Le rythme est de six semaines en formation intensive, puis de trois semaines en entreprise et une semaine en formation en alternance. À l’issue de ce cursus, les entreprises se sont engagées à embaucher en contrat à durée indéterminée les jeunes qu’elles suivent si ces derniers réussissent. Les entreprises jouent là véritablement leur rôle sociétal. Elles s’engagent à nos côtés pour offrir un véritable parcours professionnel. C’est un projet auquel je suis très attaché parce qu’il démontre que, quand un secteur économique se met en place et qu’il dispose des moyens structurés et structurels pour accompagner la politique, cela fonctionne.
Revenons à la dimension durable de la construction. Avec la législation qui se durcit, de nouveaux métiers apparaissent. Par quelles initiatives concrètes de formation cela se traduit-il?
Nous sommes à un moment-charnière où les métiers de la construction vont devoir ‘révoluer’. Les indicateurs sont en train de changer. Le prix au m2 est évidemment une composante importante, mais ce ne sera bientôt plus le seul. On commence aujourd’hui à raisonner en coût global, à avoir une vision à long terme.
Notre institut dispense une gamme de formations qui est le reflet du marché de la construction et qui s’étend vers toujours plus de domaines et vers un public plus large. Ce qui nous anime est de contribuer à préparer le secteur pour que, dans moins de dix ans, il soit apte à relever les défis qui lui seront posés. Pour cela, nous proposons des spécialisations dans les ‘Green Jobs’. Il s’agit de formations liées à l’efficacité énergétique des bâtiments qui portent, par exemple, sur la mise en place d’une maçonnerie isolante, de panneaux solaires ou de châssis, sur les constructions en bois, sur l’analyse thermographique et le blowerdoor test ou encore sur le conseil en construction durable.
Prochains rendez-vous…
L’IFSB sera présent aux myenergy days du 29 avril au 1er mai à Luxexpo et au concours national des métiers et des professions organisé par Luxskill du 2 au 6 mai au CNFPC d’Esch-sur-Alzette (cf. nos articles dans la présente édition).